HC/E/USf 530
UNITED STATES - FEDERAL JURISDICTION
United States Court of Appeals for the Eighth Circuit
Appellate Court
ISRAEL
UNITED STATES - FEDERAL JURISDICTION
8 May 2003
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Habitual Residence - Art. 3 | Grave Risk - Art. 13(1)(b) | Objections of the Child to a Return - Art. 13(2) | Procedural Matters
Appeal allowed, return ordered
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S'agissant de la question de la résidence habituelle, 7 juges se déclarèrent favorables au jugement prononcé par Beam C.J., lequel avait exprimé une opinion dissidente en appel le 11 décembre 2002. La majorité estima que si la residence habituelle était traitée comme une question purement factuelle déterminée par chaque juge en fonction des circonstances propres à chaque affaire, les parents ne seraient jamais en mesure de déterminer s'ils risquent de perdre la garde de leur enfant lorsqu'ils les autorisent à faire un voyage à l'étranger pour y rejoindre un ancien conjoint ou en compagnie de celui ou celle-ci. Par conséquent, ils décidèrent que le concept de résidence habituelle est un concept légal. La majorité des juges estima que le tribunal cantonal aurait dû rechercher la résidence habituelle des enfants au moment du déplacement par la mère, gardant en mémoire que ceux-ci ne pouvaient avoir qu'une résidence habituelle. Le tribunal cantonal aurait dû rechercher quel était le degré de l'intention de s'installer à l'étranger tel que les enfants le percevaient, eu égard au déplacement dans l'espace de la famille avec ses biens et ses animaux, à la durée du déplacement, au fait que la famille avait abandonné sa précédente résidence habituelle, avait demandé et reçu des prestations sociales accordées uniquement aux immigrants en Israël, au fait que les enfants étaient inscrits à l'école et, dans une certaine mesure, à la volonté des deux parents au moment de l'installation en Israël. La majorité décida que contrairement aux affaires In re Ponath, 829 F. Supp. 363 (D. Utah 1993) [Référence INCADAT : HC/E/USf 144] et Tsarbopoulos v Tsarbopoulos 176 F. Supp. 2d 1045; 2001 U.S. Dist [Référence INCADAT : HC/E/USf 482], il n'y avait pas eu de violences avant le déplacement et la mère n'avait pas été forcée à s'installer en Israël. La mère voulait s'y installer de manière permanente. Son désir subséquent de rentrer aux Etats-Unis et le fait qu'elle ait été victime de violences deux mois après son arrivée, comme l'avait constaté le juge cantonal, ne changeaient rien ay fait que les enfants avaient acquis une résidence habituelle en Israël et perdu leur résidence habituelle dans le Minnesota. Les deux juges qui avaient rendu l'opinion majoritaire en décembre 2002 ainsi que deux autres juges exprimèrent une opinion dissidente quant à l'interprétation donnée à la notion de résidence habituelle. L'opinion dissidente exprimait la conviction que le tribunal cantonal avait fait ce qui est précisément exigé par la Convention de La Hayen à savoir examiner l'ensemble des circonstances et avaient constaté que les parents n'avaient pas l'intention commune d'abandonner les Etats-Unis comme pays de résidence habituelle de leurs enfants. Les juges minoritaires indiquaient que la majorité de leurs confrères avaient accordé une importance sélective à certains aspects qui auraient pu conduire le tribunal cantonal à prendre une position différente; notamment le fait que les parents avaient vendu leur maison et envoyé leurs bien en Israël. Toutefois, la majorité avait passé sous silence d'autres aspects qui affaiblissaient sa position, tels que le fait que la famille n'avait pas quitté les Etats-Unis depuis longtemps ( d'autant que 10 des 11 mois passés par la mère et les enfants en Israëls l'avaient été à la suite de contrainte), qu'ils n'avaient pas acheté de maison en Israël, qu'ils avaient reconnus dans deux instances séparées depuis qu'ils étaient en Israël que le Minnesota était leur patrie. Par conséquent, le tribunal cantonal avait pu à bon droit considérer dans le cadre de son pouvoir souverain d'appréciation que le père n'avait pas rapporté la preuve que les enfants avaient bien leur résidence habituelle en Israël.
La majorité des juges observa que les éléments de preuve rapportés étaient relatifs à la situation générale de violence qui affectait tous les résidents du pays. Ils estimèrent que cela ne suffisait pas à établir l'existence d'une zone de guerre susceptible d'exposer les enfants à un risque grave de danger physique ou psychologique. 4 des 12 juges considérèrent toutefois qu'il appartenait au tribunal cantonal de décider si les enfants seraient exposés à un risque grave de danger psychologique s'ils venaient à être déplacés séparément ou collectivement du foyer maternel aux Etats-Unis et renvoyés en Israël.
5 des 12 juges estimèrent que l'affaire devrait être renvoyée au juge cantonal afin qu'il détermine si les enfants souhaitaient ou non rentrer en Israël etdans ce dernier cas, s'il avaient, à 11 ans 1/2 et 8 ans, désormais atteint un âge et une maturité tels qu'il doit être tenu compte de leur opposition.
La cour observa qu'on pouvait se demander en l'espèce si le jugement étatique du 4 mai 2001 avait eu pour conséquence de rendre les tribunaux fédéraux inférieurs incompétents matériellement pour se prononcer sur les questions relevant de la Convention de La Haye que le père avait invoquées devant les juges cantonaux fédéraux. A l'unanimité, la cour estima que la doctrine Rooker-Feldman était inapplicable en l'espèce.
Le 28 août 2003, le tribunal fédéral cantonal du Minnesota rendit une décision précisant les modalités de retour des enfants: Silverman v. Silverman, 2003 U.S. Dist. LEXIS 15788 (D. Minn., Aug. 28, 2003).
Demande adressée à la Cour suprême des États-Unis rejettée par Schuster v. Silverman, 157 L. Ed. 2d 893, 2004 U.S. LEXIS 87 (U.S., 2004).
L'interprétation de la notion centrale de résidence habituelle (préambule, art. 3 et 4) s'est révélée particulièrement problématique ces dernières années, des divergences apparaissant dans divers États contractants. Une approche uniforme fait défaut quant à la question de savoir ce qui doit être au cœur de l'analyse : l'enfant seul, l'enfant ainsi que l'intention des personnes disposant de sa garde, ou simplement l'intention de ces personnes. En conséquence notamment de cette différence d'approche, la notion de résidence peut apparaître comme un élément de rattachement très flexible dans certains États contractants ou un facteur de rattachement plus rigide et représentatif d'une résidence à long terme dans d'autres.
L'analyse du concept de résidence habituelle est par ailleurs compliquée par le fait que les décisions concernent des situations factuelles très diverses. La question de la résidence habituelle peut se poser à l'occasion d'un déménagement permanent à l'étranger, d'un déménagement consistant en un test d'une durée illimitée ou potentiellement illimitée ou simplement d'un séjour à l'étranger de durée déterminée.
Tendances générales:
La jurisprudence des cours d'appel fédérales américaines illustre la grande variété d'interprétations données au concept de résidence habituelle.
Approche centrée sur l'enfant
La cour d'appel fédérale des États-Unis d'Amérique du 6e ressort s'est prononcée fermement en faveur d'une approche centrée sur l'enfant seul :
Friedrich v. Friedrich, 983 F.2d 1396, 125 ALR Fed. 703 (6th Cir. 1993) (6th Cir. 1993) [Référence INCADAT : HC/E/USf 142]
Robert v. Tesson, 507 F.3d 981 (6th Cir. 2007) [Référence INCADAT : HC/E/US 935]
Voir aussi :
Villalta v. Massie, No. 4:99cv312-RH (N.D. Fla. Oct. 27, 1999) [Référence INCADAT : HC/E/USf 221].
Approche combinée des liens de l'enfant et de l'intention parentale
Les cours d'appel fédérales des États-Unis d'Amérique des 3e et 8e ressorts ont privilégié une méthode où les liens de l'enfant avec le pays ont été lus à la lumière de l'intention parentale conjointe.
Le jugement de référence est le suivant : Feder v. Evans-Feder, 63 F.3d 217 (3d Cir. 1995) [Référence INCADAT : HC/E/USf 83].
Voir aussi :
Silverman v. Silverman, 338 F.3d 886 (8th Cir. 2003) [Référence INCADAT : HC/E/USf 530] ;
Karkkainen v. Kovalchuk, 445 F.3d 280 (3rd Cir. 2006) [Référence INCADAT : HC/E/USf 879].
Dans cette dernière espèce, une distinction a été pratiquée entre la situation d'enfants très jeunes (où une importance plus grande est attachée à l'intention des parents - voir par exemple : Baxter v. Baxter, 423 F.3d 363 (3rd Cir. 2005) [Référence INCADAT : HC/E/USf 808]) et celle d'enfants plus âgés pour lesquels l'intention parentale joue un rôle plus limité.
Approche centrée sur l'intention parentale
Aux États-Unis d'Amérique, la Cour d'appel fédérale du 9e ressort a rendu une décision dans l'affaire Mozes v. Mozes, 239 F.3d 1067 (9th Cir. 2001) [Référence INCADAT : HC/E/USf 301], qui s'est révélée très influente en exigeant la présence d'une intention ferme d'abandonner une résidence préexistante pour qu'un enfant puisse acquérir une nouvelle résidence habituelle.
Cette interprétation a été reprise et précisée par d'autres décisions rendues en appel par des juridictions fédérales de sorte qu'en l'absence d'intention commune des parents en cas de départ pour l'étranger, la résidence habituelle a été maintenue dans le pays d'origine, alors même que l'enfant a passé une période longue à l'étranger. Voir par exemple :
Holder v. Holder, 392 F.3d 1009 (9th Cir 2004) [Référence INCADAT : HC/E/USf 777] : Résidence habituelle maintenue aux États-Unis d'Amérique malgré un séjour prévu de 4 ans en Allemagne ;
Ruiz v. Tenorio, 392 F.3d 1247 (11th Cir. 2004) [Référence INCADAT : HC/E/USf 780] : Résidence habituelle maintenue aux États-Unis d'Amérique malgré un séjour de 32 mois au Mexique ;
Tsarbopoulos v. Tsarbopoulos, 176 F. Supp.2d 1045 (E.D. Wash. 2001) [INCADAT : HC/E/USf 482] : Résidence habituelle maintenue aux États-Unis d'Amérique malgré un séjour de 27 mois en Grèce.
La décision rendue dans l'affaire Mozes a également été approuvée par les cours fédérales d'appel du 2e et du 7e ressort :
Gitter v. Gitter, 396 F.3d 124 (2nd Cir. 2005) [Référence INCADAT : HC/E/USf 776] ;
Koch v. Koch, 450 F.3d 703 (2006 7th Cir.) [Référence INCADAT : HC/E/USf 878] ;
Il convient de noter que dans l'affaire Mozes, la Cour a reconnu que si suffisamment de temps s'est écoulé et que l'enfant a vécu une expérience positive, la vie de l'enfant peut être si fermement attachée à son nouveau milieu qu'une nouvelle résidence habituelle doit pouvoir y être acquise nonobstant l'intention parentale contraire.
Autres États contractants
Dans d'autres États contractants, la position a évolué :
Autriche
La Cour suprême d'Autriche a décidé qu'une résidence de plus de six mois dans un État sera généralement caractérisée de résidence habituelle, quand bien même elle aurait lieu contre la volonté du gardien de l'enfant (puisqu'il s'agit d'une détermination factuelle du centre de vie).
8Ob121/03g, Oberster Gerichtshof [Référence INCADAT: HC/E/AT 548].
Canada
Au Québec, au contraire, l'approche est centrée sur l'enfant :
Dans Droit de la famille 3713, No 500-09-010031-003 [Référence INCADAT : HC/E/CA 651], la Cour d'appel de Montréal a décidé que la résidence habituelle d'un enfant est simplement une question de fait qui doit s'apprécier à la lumière de toutes les circonstances particulières de l'espèce en fonction de la réalité vécue par l'enfant en question, et non celle de ses parents. Le séjour doit être d'une durée non négligeable (nécessaire au développement de liens par l'enfant et à son intégration dans son nouveau milieu) et continue, aussi l'enfant doit-il avoir un lien réel et actif avec sa résidence; cependant, aucune durée minimale ne peut être formulée.
Allemagne
Une approche factuelle et centrée sur l'enfant ressort également de la jurisprudence allemande :
2 UF 115/02, Oberlandesgericht Karlsruhe [Référence INCADAT: HC/E/DE 944].
La Cour constitutionnelle fédérale a ainsi admis qu'une résidence habituelle puisse être acquise bien que l'enfant ait été illicitement déplacé dans le nouvel État de résidence :
Bundesverfassungsgericht, 2 BvR 1206/98, 29. Oktober 1998 [Référence INCADAT: HC/E/DE 233].
La Cour constitutionnelle a confirmé l'analyse de la Cour régionale d'appel selon laquelle les enfants avaient acquis leur résidence habituelle en France malgré la nature de leur déplacement là-bas. La Cour a en effet considéré que la résidence habituelle était un concept factuel, et les enfants s'étaient intégrés dans leur milieu local pendant les neuf mois qu'ils y avaient vécu.
Israël
Des approches alternatives ont été adoptées lors de la détermination de la résidence habituelle. Il est arrivé qu'un poids important ait été accordé à l'intention parentale. Voir :
Family Appeal 1026/05 Ploni v. Almonit [Référence INCADAT: HC/E/Il 865] ;
Family Application 042721/06 G.K. v Y.K. [Référence INCADAT: HC/E/Il 939].
Cependant, il a parfois été fait référence à une approche plus centrée sur l'enfant. Voir :
décision de la Cour suprême dans C.A. 7206/03, Gabai v. Gabai, P.D. 51(2)241 ;
FamA 130/08 H v H [Référence INCADAT: HC/E/IL 922].
Nouvelle-Zélande
Contrairement à l'approche privilégiée dans l'affaire Mozes, la cour d'appel de la Nouvelle-Zélande a expressément rejeté l'idée que pour acquérir une nouvelle résidence habituelle, il convient d'avoir l'intention ferme de renoncer à la résidence habituelle précédente. Voir :
S.K. v. K.P. [2005] 3 NZLR 590 [Référence INCADAT: HC/E/NZ 816].
Suisse
Une approche factuelle et centrée sur l'enfant ressort de la jurisprudence suisse :
5P.367/2005/ast, Bundesgericht, II. Zivilabteilung (Tribunal Fédéral, 2ème Chambre Civile) [Référence INCADAT: HC/E/CH 841].
Royaume-Uni
L'approche standard est de considérer conjointement la ferme intention des personnes ayant la charge de l'enfant et la réalité vécue par l'enfant.
Re J. (A Minor) (Abduction: Custody Rights) [1990] 2 AC 562, [1990] 2 All ER 961, [1990] 2 FLR 450, sub nom C. v. S. (A Minor) (Abduction) [Référence INCADAT: HC/E/UKe 2].
Pour un commentaire doctrinal des différentes approches du concept de résidence habituelle dans les pays de common law. Voir :
R. Schuz, « Habitual Residence of Children under the Hague Child Abduction Convention: Theory and Practice », Child and Family Law Quarterly, Vol. 13, No1, 2001, p.1 ;
R. Schuz, « Policy Considerations in Determining Habitual Residence of a Child and the Relevance of Context » Journal of Transnational Law and Policy, Vol. 11, 2001, p. 101.
Dans la jurisprudence conventionnelle ancienne, les cours se sont montrées peu enclines à admettre qu'un enfant puisse se trouver sans résidence habituelle, notamment en raison du fait qu'une telle conclusion rendait inapplicable la Convention, voir :
Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re F. (A Minor) (Child Abduction) [1992] 1 FLR 548 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 40];
Australie
Cooper v. Casey (1995) FLC 92-575 [Référence INCADAT : HC/E/AU 104].
Toutefois, plus récemment on constate que les cours reconnaissent qu'il y a des situations dans lesquelles il est impossible d'admettre que l'enfant a une résidence habituelle quelque part.
D.W. & Director-General, Department of Child Safety [2006] FamCA 93, [Référence INCADAT : HC/E/AU 870].
Dans cette affaire, la majorité des juges a estimé que certes leur conclusion empêchait l'application de la Convention mais a souligné que l'intérêt des enfants pouvait pâtir d'une trop grande propension des tribunaux à admettre que le parent ayant tenté de se réconcilier avec l'autre parent en vivant avec lui à l'étranger afin de donner à l'enfant une famille biparentale doit, avec l'enfant, avoir acquis une résidence habituelle dans cet État.
Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
W. and B. v. H. (Child Abduction: Surrogacy) [2002] 1 FLR 1008 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 470] ;
Royaume-Uni - Écosse
Robertson v. Robertson 1998 SLT 468 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 194] ;
D. v. D. 2002 SC 33 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 351] ;
Nouvelle-Zélande
S.K. v. K.P. [2005] 3 NZLR 590, [Référence INCADAT : HC/E/NZ 816] ;
États-Unis d'Amérique
Delvoye v. Lee, 329 F.3d 330 (3rd Cir. 2003) [Référence INCADAT : HC/E/USf 529] ;
Ferraris v. Alexander, 125 Cal. App. 4th 1417 (2005) [Référence INCADAT : HC/E/US 797].
Les commentateurs ont longtemps estimé que la nature factuelle du facteur de rattachement implique que dans certaines situations une personne puisse avoir plusieurs résidences habituelles à un moment donné.
Voir en particulier :
E. M. Clive, « The Concept of Habitual Residence », Juridical Review (1997), p. 137.
La cour d'appel anglaise a estimé dans le contexte de la compétence internationale en matière de divorce qu'un adulte pouvait avoir plusieurs résidences habituelles en même temps. Voir :
Ikimi v. Ikimi [2001] EWCA Civ 873, [2002] Fam 72.
Toutefois les tribunaux saisis de demandes en application de la Convention ont estimé qu'un enfant ne peut avoir qu'une seule résidence habituelle à un moment donné. Voir par exemple :
Canada
S.S.-C. c. G.C., Cour supérieure (Montréal), 15 août 2003, n° 500-04-033270-035, [INCADAT cite : HC/E/CA 916] ;
Wilson v. Huntley (2005) A.C.W.S.J. 7084; 138 A.C.W.S. (3d) 1107 [Référence INCADAT : HC/E/CA 800] ;
Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re v. (Abduction: Habitual Residence) [1995] 2 FLR 992, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 45].
En l'espèce, les enfants passaient une partie de l'année en Grèce et l'autre en Angleterre. La cour refusa de considérer qu'ils avaient à la fois leur résidence habituelle en Grèce et en Angleterre.
Royaume-Uni - Ireland du Nord
Re C.L. (A Minor); J.S. v. C.L., transcript, 25 August 1998, High Court of Northern Ireland, [Référence INCADAT: HC/E/UKn 390].
États-Unis d'Amérique
Friedrich v. Friedrich, 983 F.2d 1396, (6th Cir. 1993), [Référence INCADAT : HC/E/USf 142].
Lorsqu'une intention de s'installer à l'étranger pour y commencer un nouveau chapitre de sa vie est établie, la résidence habituelle préexistante va être perdue et une nouvelle résidence habituelle pourra rapidement être acquise.
Dans les pays de common law, il est admis que cette acquisition peut survenir rapidement, voir :
Canada
DeHaan v. Gracia [2004] AJ No.94 (QL), [2004] ABQD 4 [Référence INCADAT : HC/E/CA 576];
Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re J. (A Minor) (Abduction: Custody Rights) [1990] 2 AC 562 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 2];
Re F. (A Minor) (Child Abduction) [1992] 1 FLR 548, [1992] Fam Law 195 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 40]
Dans les pays de droit civil, il a été admis qu'une résidence habituelle peut être acquise immédiatement, voir:
Suisse
5P.367/2005/ast, Bundesgericht, II. Zivilabteilung (Tribunal Fédéral, 2ème Chambre Civile), [Référence INCADAT: HC/E/CH 841].
Déménagements soumis à une condition future
Si l'accord des parents concernant le déménagement est soumis à une condition future, la résidence habituelle qui existait avant le déménagement est-elle perdue immédiatement lors du déménagement ?
Australie
Le tribunal familial australien (the Family Court of Australia) siégeant en séance plénière a répondu par la négative à cette question et a également déclaré que la perte de la résidence habituelle pouvait même ne pas découler de la réalisation de la condition en question, si à ce moment-là le parent désirant déménager ne s'engage pas clairement à déménager :
Kilah & Director-General, Department of Community Services [2008] FamCAFC 81, [Référence INCADAT : HC/E/AU 995].
Cependant, cette décision a été renversée en appel par la Haute Cour d'Australie, qui a considéré qu'une résidence habituelle existante pouvait être perdue si la volonté de déménager présentait un degré suffisant de continuité pour être décrite comme ferme. Il n'était donc pas nécessaire d'avoir une ferme intention d'établir sa résidence sur le « long terme ».
L.K. v. Director-General Department of Community Services [2009] HCA 9, (2009) 253 ALR 202, [Référence INCADAT: HC/E/AU 1012].
Lorsque la durée de l'installation à l'étranger est illimitée ou potentiellement illimitée, il est également possible de perdre une résidence habituelle antérieure et d'en acquérir une nouvelle relativement rapidement. Voir :
Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles (cas ne relevant pas de la Convention)
Al Habtoor v. Fotheringham [2001] EWCA Civ 186 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 875] ;
Nouvelle-Zélande
Callaghan v. Thomas [2001] NZFLR 1105 [Référence INCADAT : HC/E/NZ 413] ;
Royaume-Uni - Écosse
Cameron v. Cameron 1996 SC 17, 1996 SLT 306, 1996 SCLR 25 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 71] ;
Moran v. Moran 1997 SLT 541 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 74] ;
États-Unis d'Amérique
Karkkainen v. Kovalchuk, 445 F.3d 280 (3rd Cir. 2006) [Référence INCADAT : HC/E/USf 879].
Lorsque la durée d'un séjour à l'étranger est d'emblée limitée, même si le séjour doit être relativement long, certains États contractants ont considéré que la résidence habituelle était maintenue dans l'État d'origine. Voir :
Danemark
Ø.L.K., 5. April 2002, 16. afdeling, B-409-02 [Référence INCADAT : HC/E/DK 520];
Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re H. (Abduction: Habitual Residence: Consent) [2000] 2 FLR 294; [2000] 3 FCR 412 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 478];
États-Unis d'Amérique
Morris v. Morris, 55 F. Supp. 2d 1156 (D. Colo., Aug. 30, 1999) [Référence INCADAT : HC/E/USf 306];
Mozes v. Mozes, 239 F.3d 1067 (9th Cir. 2001) [Référence INCADAT : HC/E/USf 301].
Toutefois, la Cour fédérale d'appel du troisième ressort estima qu'une résidence habituelle nouvelle avait pu être acquise assez rapidement dans une situation où le séjour à l'étranger devait durer 2 ans. Voir :
Whiting v. Krassner 391 F.3d 540 (3rd Cir. 2004) [Référence INCADAT : HC/E/US 778].
En Angleterre, une décision de première instance a considéré qu'un enfant avait pu acquérir une résidence habituelle en Allemagne après un séjour de 5 mois dans ce pays alors même que la famille y était établie pour un contrat de 6 mois. Voir:
Re R. (Abduction: Habitual Residence) [2003] EWHC 1968 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 580].
La Cour d'appel de Chine (RAS Hong-Kong) a considéré qu'un déménagement à l'étranger pour 21 mois conduisait à un changement de résidence habituelle. Voir:
B.L.W. v. B.W.L. [2007] 2 HKLRD 193, [Référence INCADAT : HC/E/HK 975].
Une exception de l'article 13(1)(b) a parfois été invoquée mettant en cause non pas un risque individuel pour l'enfant mais résultant des conditions de vie dans l'État de la résidence habituelle.
Dans l'arrêt d'appel fameux rendu aux États-Unis d'Amérique dans Friedrich v. Friedrich, 78 F.3d 1060 (6th Cir. 1996) [Référence INCADAT : HC/E/USf 82], la Cour constata entre autres qu'un risque grave ne pouvait être pris en compte que lorsque le retour est de nature à exposer l'enfant à un danger immédiat pouvant se matérialiser avant la résolution de la question de la garde, par exemple dans le cas où l'enfant est renvoyé dans une zone de guerre ou de famine.
La question s'est notamment posée au regard d'un retour en Israël.
Retour en Israël
La question de savoir si le retour d'enfants en Israël est de nature à les exposer à un risque grave de danger a divisé les tribunaux appelés à se prononcer sur ce point. Une majorité de juridictions a considéré que ce n'était pas le cas. Voir :
Argentine
A. v. A [Référence INCADAT : HC/E/AR 487]
Australie
Kilah & Director-General, Department of Community Services [2008] FamCAFC 81 [Référence INCADAT : HC/E/AU 995]
Belgique
N° 03/3585/A, Tribunal de première instance de Bruxelles, 17/4/2003 [Référence INCADAT : HC/E/BE 547]
Canada
Docket No 1 F 3709/00; C., 4 décembre 2001, Superior Court of Justice, Ontario, Court File No 01-FA-10575
Danemark
V.L.K., 11. januar 2002, 13. afdeling, B-2939-01, Vestre Landsret; High Court, Western Division [Référence INCADAT : HC/E/DK 519]
Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re S. (A Child) (Abduction: Grave Risk of Harm) [2002] 3 FCR 43, [2002] EWCA Civ 908 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 469]
France
CA Aix en Provence, 8 octobre 2002, No de RG 02/14917 [Référence INCADAT : HC/E/FR 509]
Allemagne
1 F 3709/00, Familiengericht Zweibrücken (Family Court), 25 January 2001 [Référence INCADAT: HC/E/DE 392]
États-Unis d'Amérique
Freier v. Freier, 969 F. Supp. 436 (E.D. Mich. 1996) [Référence INCADAT : HC/E/USf 133]
Toutefois, l'argument a été accueilli dans certaines affaires :
Australie
Janine Claire Genish-Grant and Director-General Department of Community Services [2002] FamCA 346 [Référence INCADAT : HC/E/AU 458]
États-Unis d'Amérique
Silverman v. Silverman, 2002 U.S. Dist. LEXIS 8313 [Référence INCADAT : HC/E/USf 481] (voir néanmoins Silverman v. Silverman, 338 F.3d 886 (8th Cir. 2003) [Référence INCADAT : HC/E/US 530]
Retour au Zimbabwe
La Chambre des Lords britannique, instance suprême du Royaume-Uni a rejeté l'argument selon lequel le climat politique et moral était tel au Zimbabwe que le retour d'enfants dans ce pays serait de nature à les exposer à un risque grave de danger psychologique ou à une situation intolérable.
Re M. (Abduction: Zimbabwe) [2007] UKHL 55, [2008] 1 AC 1288 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 937].
Retour au Mexique
CA Rennes, 28 juin 2011, No de RG 11/02685 [Référence INCADAT : HC/E/FR 1129]
La mère citait la pollution existant à Mexico, l'insécurité générée par la délinquance dans la métropole de Mexico ainsi que les risques sismiques. Toutefois elle ne montrait pas en quoi ces risques touchaient personnellement et directement les enfants. Elle n'avait pas mentionné ces facteurs pour justifier son choix de s'établir en France dans un document adressé au père en 2010, mais avait fait état de difficultés financières et familiales. En outre, la Cour nota que ces facteurs ne l'avaient pas dissuadé de vivre à Mexico de 1998 à 2010 et d'y avoir élevé deux enfants. Elle releva encore que la mère n'avait pas cru opportun de demander l'autorisation aux autorités mexicaines de s'établir en France avec les enfants, sans expliquer les raisons qui, selon elle, pourraient compromettre son droit à un procès équitable au Mexique.
La Cour clarifia qu'elle n'affirmait pas que les éléments soulevés par la mère étaient dénués de fondement. Ils pourraient être éventuellement utilisés dans le cadre de la question de la garde, mais ne suffisaient pas à établir l'existence d'un risque grave de danger.
(Auteur du résumé : Peter McEleavy, Avril 2013)