AFFAIRE

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Nom de l'affaire

Solicitud conforme al Convenio de La Haya sobre los Aspectos Civiles de la Sustracción Internacional de Menores - Casación, IUE 9999-68/2010

Référence INCADAT

HC/E/UY 1185

Juridiction

Pays

Uruguay

Degré

Instance Suprême

États concernés

État requérant

États-Unis d'Amérique

État requis

Uruguay

Décision

Date

3 August 2012

Statut

Définitif

Motifs

Objectifs de la Convention - Préambule, art. 1 et 2 | Déplacement et non-retour - art. 3 et 12 | Risque grave - art. 13(1)(b) | Opposition de l'enfant au retour - art. 13(2) | Questions procédurales

Décision

Recours accueilli, retour refusé

Article(s) de la Convention visé(s)

13(1)(b) 13(2)

Article(s) de la Convention visé(s) par le dispositif

13(1)(b) 13(2)

Autres dispositions

-

Jurisprudence | Affaires invoquées

-

Publiée dans

-

INCADAT commentaire

Objectifs et domaine d’application de la Convention

Objectifs de la Convention
Objectifs de la Convention

Exceptions au retour

Risque grave de danger
Enlèvements par le parent ayant la responsabilité principale de l'enfant
Opposition de l’enfant
Âge et maturité requis

Mise en œuvre & difficultés d’application

Questions procédurales
Exigence de traitement rapide de la demande (art. 11)

RÉSUMÉ

Résumé disponible en EN | FR | ES

Faits

L'enfant est né en 2006 aux États-Unis d'Amérique. Le père a reconnu l'enfant, et les parents se sont mariés après la naissance. L'enfant a vécu aux États-Unis d'Amérique avant d'être emmené en Uruguay.

Les parents n'habitant pas ensemble lorsque la mère a souhaité emmener l'enfant en vacances, le père a consenti à ce que celui-ci séjourne en Uruguay pour une période de 15 jours. La mère et l'enfant se sont rendus en Uruguay en février 2010. À expiration du délai convenu, la mère a décidé de ne pas ramener l'enfant aux États-Unis d'Amérique.

En décembre 2010, un tribunal de première instance uruguayen a estimé que le non-retour était illicite mais a refusé d'ordonner le retour de l'enfant, au motif qu'un nouveau déplacement, et la séparation de la mère et de l'enfant, exposeraient ce dernier à un risque psychologique.

Le père a contesté la décision et la Cour d'appel (Tribunal de Apelaciones de Familia de 1er. Turno) a partiellement révoqué le jugement rendu en première instance, ordonnant le retour de l'enfant aux États-Unis d'Amérique. Mère et enfant ont fait appel.

Dispositif

Recours accueilli et retour refusé ; le non-retour était illicite, mais la Cour suprême a estimé que le niveau de danger requis par l'article 13(1)(b) était établi.

Motifs

Objectifs de la Convention - Préambule, art. 1 et 2


La Cour a souligné que la Convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant (CNUDE) et la Convention de La Haye de 1980 sur l'enlèvement d'enfants étaient complémentaires et prévoyaient que l'intérêt supérieur de l'enfant devait primer dans les affaires relevant de la Convention de La Haye de 1980 sur l'enlèvement d'enfants.
 
À cet égard, la Cour s'est référée à l'article 2 de la « Loi modèle de procédure concernant l'application des Conventions relatives à l'enlèvement international d'enfants » (adoptée par l'Uruguay au moyen de la Loi 18.895), conformément à laquelle le critère principal concernant l'interprétation et, le cas échéant, l'intégration, doit être l'intérêt supérieur de l'enfant, compris comme son droit de ne pas être illicitement retenu ou emmené, le droit à ce que la question de sa garde soit jugée devant le Tribunal compétent de l'État de sa résidence habituelle, le droit de maintenir des contacts étroits avec ses deux parents et leurs familles respectives et le droit à une décision rapide concernant les demandes de retour ou de visite introduites au niveau international. S'agissant de l'interprétation de la notion d'intérêt supérieur de l'enfant, la Cour s'est expressément référée aux para. 23 et 24 du rapport établi par le Professeur Pérez-Vera.

La Cour a donc conclu qu'en refusant d'ordonner le retour de l'enfant, elle cherchait à éviter de faire plus de mal à l'enfant que n'en auraient fait les pratiques-mêmes que la Convention cherche à combattre.

Déplacement et non-retour - art. 3 et 12


La Cour est convenue que le non-retour de l'enfant, emmené en Uruguay, était illicite, dans la mesure où celui-ci n'avait pas été ramené aux États-Unis d'Amérique au terme du séjour de 15 jours qui était prévu.

Risque grave - art. 13(1)(b)


La Cour a confirmé la décision rendue par le Tribunal de première instance, qui avait refusé d'ordonner le retour de l'enfant en se fondant sur l'article 13(1)(b), mais pour des raisons distinctes.

La Cour a souligné que les situations prévues par l'article 13(1)(b) devaient être définies strictement, sur la base d'une analyse des faits. En outre, elle a estimé qu'afin de refuser d'ordonner le retour au motif de l'exception prévue par l'article 13(1)(b), il était nécessaire que l'enfant soit exposé à de graves troubles émotionnels, plus significatifs que ceux que provoquerait en temps normal la rupture de ses parents.

La Cour a cité le Professeur Santos Belandro, qui avait déclaré que le risque psychologique recouvrait toutes les situations susceptibles d'affecter considérablement le bon développement de l'enfant sur les plans émotionnel et intellectuel. Le Professeur Belandro a également estimé que lorsqu'il existait un risque sérieux et objectivement vérifiable que le retour expose l'enfant à un risque grave de nature physique ou psychologique, l'exception devrait s'appliquer (cf. Santos Belandro, Minoridad y Ancianidad en el Mundo actual, Asociación de escribanos del Uruguay, 2007, pág. 228).

Par conséquent, la Cour a analysé le risque grave de danger qu'un retour à la situation de départ impliquerait pour l'enfant. À cet égard, la Cour a évalué l'opinion formulée par l'expert concernant les conséquences psychologiques pour l'enfant en cas de séparation de sa mère, la peur et les incertitudes de l'enfant s'agissant d'un voyage de son père en Uruguay et les représailles que le père pourrait exercer contre la mère. La Cour a également estimé que la discipline imposée par le père n'était pas appropriée aux besoins d'un enfant en bas âge et que l'enfant avait probablement été témoin de violences familiales entre ses parents.

Opposition de l'enfant au retour - art. 13(2)
La Cour suprême a admis qu'il convenait de tenir compte des déclarations de l'enfant, en dépit de son jeune âge (quatre ans).

Opposition de l'enfant au retour - art. 13(2)

-

Questions procédurales


Douze mois se sont écoulés avant que le procès et le premier appel n'aient lieu et il a fallu huit mois supplémentaires pour que la Cour suprême rende une décision.

La Cour suprême a estimé que la Cour d'appel avait violé l'article 3 de la CNUDE et l'article 13(1)(b) de la Convention de La Haye de 1980 sur l'enlèvement d'enfants, dans la mesure où les conditions d'un retour en sécurité n'avaient pas été établies au moment où le retour de l'enfant a été ordonné.

Auteurs du résumé : Nieve Rubaja, Ignacio Goicoechea, Florencia Castro

Commentaire INCADAT

Objectifs de la Convention

Les juridictions de tous les États contractants doivent inévitablement se référer aux objectifs de la Convention et les évaluer si elles veulent comprendre le but de cet instrument et être ainsi guidées quant à la manière d'interpréter ses notions et d'appliquer ses dispositions.

La Convention de La Haye de 1980 sur l'enlèvement d'enfants comprend explicitement et implicitement toute une série de buts et d'objectifs, positifs et négatifs, car elle cherche à établir un équilibre délicat entre les intérêts concurrents des principaux acteurs : l'enfant, le parent délaissé et le parent ravisseur. Voir, par exemple, le débat sur cette question dans la décision de la Cour suprême du Canada: W.(V.) v. S.(D.), (1996) 2 SCR 108, (1996) 134 DLR 4th 481, [Référence INCADAT : HC/E/CA 17].

L'article 1 identifie les principaux objectifs, à savoir que la Convention a pour objet :
a) d'assurer le retour immédiat des enfants déplacés ou retenus illicitement dans tout État contractant et
b) de faire respecter effectivement dans les autres États contractants les droits de garde et de visite existant dans un État contractant.

De plus amples détails sont fournis dans le préambule, notamment au sujet de l'objectif premier d'obtenir le retour des enfants, lorsque leur déplacement ou leur rétention a donné lieu à une violation des droits de garde effectivement exercés.  Il y est indiqué que :

L'intérêt de l'enfant est d'une importance primordiale pour toute question relative à sa garde ;

Et les États signataires désirant :
protéger l'enfant, sur le plan international, contre tous les effets nuisibles d'un déplacement ou d'un non-retour illicites et établir des procédures en vue de garantir le retour immédiat de l'enfant dans l'État de sa résidence habituelle et d'assurer la protection du droit de visite.

L'objectif du retour et la manière dont il doit s'effectuer au mieux sont également renforcés dans les articles suivants, notamment en ce qui concerne les obligations des Autorités centrales (art. 8 à 10) et l'obligation faite aux autorités judiciaires de procéder d'urgence (art. 11).

L'article 13, avec les articles 12(2) et 20, qui énonce les exceptions au mécanisme de retour sommaire, indique que la Convention comporte un objectif supplémentaire, à savoir que dans certaines circonstances définies, la situation propre à chaque enfant devrait être prise en compte, notamment l'intérêt supérieur de l'enfant ou même du parent ayant emmené l'enfant. 

Le rapport explicatif de Mme Pérez-Vera attire l'attention au paragraphe 9 sur un objectif implicite sur lequel repose la Convention, à savoir que l'examen au fond des questions relatives aux droits de garde doit se faire par les autorités compétentes de l'État où l'enfant avait sa résidence habituelle avant d'être déplacé, voir par exemple :

Argentine
W. v. O., 14 June 1995, Argentine Supreme Court of Justice, [Référence INCADAT : HC/E/AR 362];

Finlande
Supreme Court of Finland: KKO:2004:76, [Référence INCADAT : HC/E/FI 839];

France
CA Bordeaux, 19 January 2007, No 06/002739, [Référence INCADAT : HC/E/FR 947];

Israël
T. v. M., 15 April 1992, transcript (Unofficial Translation), Supreme Court of Israel, [Référence INCADAT : HC/E/IL 214];

Pays-Bas
X. (the mother) v. De directie Preventie, en namens Y. (the father) (14 April 2000, ELRO nr. AA 5524, Zaaksnr.R99/076HR), [Référence INCADAT : HC/E/NL 316];

Suisse
5A.582/2007 Bundesgericht, II. Zivilabteilung, 4 December 2007, [Référence INCADAT : HC/E/CH 986];

Royaume-Uni - Écosse
N.J.C. v. N.P.C. [2008] CSIH 34, 2008 S.C. 571, [Référence INCADAT : HC/E/UKs 996];

États-Unis d'Amérique
Lops v. Lops, 140 F.3d 927 (11th Cir. 1998), [Référence INCADAT : HC/E/USf 125].

Le rapport de Mme Pérez-Vera associe également la dimension préventive à l'objectif de retour de l'instrument (para. 17, 18 et 25), un objectif dont il a beaucoup été question pendant le processus de ratification de la Convention aux États-Unis d'Amérique (voir : Pub. Notice 957, 51 Fed. Reg. 10494, 10505 (1986)) et sur lequel des juges se sont fondés dans cet État contractant dans leur application de la Convention. Voir :

Duarte v. Bardales, 526 F.3d 563 (9th Cir. 2008), [Référence INCADAT : HC/E/USf 1023].

Le fait d'appliquer le principe d'« equitable tolling » lorsqu'un enfant enlevé a été dissimulé a été considéré comme cohérent avec l'objectif de la Convention de décourager l'enlèvement d'enfants.

Furnes v. Reeves, 362 F.3d 702 (11th Cir. 2004), [Référence INCADAT : HC/E/USf 578].

À l'inverse des autres instances d'appel fédérales, le tribunal du 11e ressort était prêt à interpréter un droit ne exeat comme incluant le droit de déterminer le lieu de résidence de l'enfant, étant donné que le but de la Convention de La Haye est de prévenir l'enlèvement international et que le droit ne exeat donne au parent le pouvoir de décider du pays où l'enfant prendrait résidence.

Dans d'autres juridictions, la prévention a parfois été invoquée comme facteur pertinent dans l'interprétation et l'application de la Convention. Voir par exemple :

Canada
J.E.A. v. C.L.M. (2002), 220 D.L.R. (4th) 577 (N.S.C.A.), [Référence INCADAT : HC/E/CA 754] ;

Royaume-Uni  - Angleterre et Pays de Galles
Re A.Z. (A Minor) (Abduction: Acquiescence) [1993] 1 FLR 682, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 50].

Des buts et objectifs de la Convention peuvent également se trouver au centre de l'attention pendant la vie de l'instrument, comme la promotion du contact transfrontière, qui, selon des arguments avancés en ce sens, découlent d'une application stricte du mécanisme de retour sommaire de la Convention, voir :

Nouvelle-Zélande
S. v. S. [1999] NZFLR 625, [Référence INCADAT : HC/E/NZ 296];

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re R. (Child Abduction: Acquiescence) [1995] 1 FLR 716, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 60].

Il n'y a pas de hiérarchie entre les différents objectifs de la Convention (para. 18 du rapport de Mme Pérez-Vera). L'interprétation judiciaire peut ainsi diverger selon les États contractants en fonction de l'accent plus ou moins important qui sera placé sur certains objectifs. La jurisprudence peut également évoluer, sur le plan interne ou international.

Dans la jurisprudence britannique du Royaume-Uni (Angleterre et Pays de Galles), une décision de l'instance suprême de cette juridiction, la Chambre des lords, a donné lieu à une ré-évaluation des objectifs de la Convention et, partant, à un réalignement de la pratique judiciaire en ce qui concerne les exceptions :

Re M. (Children) (Abduction: Rights of Custody) [2007] UKHL 55, [2008] 1 AC 1288, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 937].

Précédemment, la volonté de donner effet à l'objectif premier d'encourager le retour et de prévenir ainsi un recours abusif aux exceptions, avait donné lieu à l'ajout d'un critère additionnel du « caractère exceptionnel », voir par exemple :

Re M. (A Child) (Abduction: Child's Objections to Return) [2007] EWCA Civ 260, [2007] 2 FLR 72, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 901].

C'est ce critère du caractère exceptionnel qui fut par la suite considéré comme non fondé par la Chambre des lords dans Re M. (Children) (Abduction: Rights of Custody) [2007] UKHL 55, [2008] 1 AC 1288, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 937].

Doctrine de la déchéance des droits du fugitif

Aux États-Unis d'Amérique, des approches différentes ont été suivies dans la jurisprudence de la Convention à l'égard de demandeurs qui n'ont pas ou n'auraient pas respecté une décision de justice en vertu de la « doctrine de la déchéance des droits du fugitif ».

Dans Re Prevot, 59 F.3d 556 (6th Cir. 1995), [Référence INCADAT : HC/E/USf 150], la doctrine de la déchéance des droits du fugitif a été appliquée, le père demandeur ayant fui les États-Unis pour échapper à sa condamnation pénale et d'autres responsabilités devant des tribunaux américains.

Walsh v. Walsh, No. 99-1747 (1st Cir. 2000), [Référence INCADAT : HC/E/USf 326].

Dans l'espèce, le père était un fugitif. Deuxièmement, on pouvait soutenir qu'il y avait un lien entre son statut de fugitif et la demande. Mais la juridiction conclut que le lien n'était pas assez fort pour que la doctrine ait à s'appliquer. En tout état de cause, la juridiction estima également que le fait d'appliquer la doctrine de la déchéance des droits du fugitif imposerait une sanction trop sévère dans une affaire de droits parentaux.

Dans March v. Levine, 249 F.3d 462 (6th Cir. 2001) [Référence INCADAT : HC/E/USf 386], la doctrine n'a pas été appliquée pour ce qui est du non-respect par le demandeur d'ordonnances civiles.

Dans l'affaire canadienne Kovacs v. Kovacs (2002), 59 O.R. (3d) 671 (Sup. Ct.) [Référence INCADAT : HC/E/CA 760], le statut de fugitif du père a été considéré comme un facteur à prendre en compte, en ce sens qu'il y avait là un risque grave de danger pour l'enfant.

Enlèvements par le parent ayant la responsabilité principale de l'enfant

La question de la position à adopter dans les situations où le parent ravisseur est le parent ayant la responsabilité principale de l'enfant, et qu'il menace de ne pas rentrer avec l'enfant dans l'État de résidence habituelle si une ordonnance de retour est rendue, est controversée.

De nombreux États contractants ont adopté une position très stricte au terme de laquelle le jeu de l'exception prévue à l'article 13(1)(b) n'a été retenu que dans des circonstances exceptionnelles quand l'argument tendant au non-retour de l'enfant était invoqué. Voir :

Autriche
4Ob1523/96, Oberster Gerichtshof [Référence INCADAT: HC/E/AT 561]

Canada
M.G. v. R.F., 2002 R.J.Q. 2132 [Référence INCADAT: HC/E/CA 762]

N.P. v. A.B.P., 1999 R.D.F. 38 [Référence INCADAT: HC/E/CA 764]

Dans cette affaire, les circonstances exceptionnelles ont résulté en une ordonnance de non-retour. La mère faisait face à une menace véritable qui lui faisait craindre légitimement pour sa sécurité si elle retournait en Israël. Elle avait été emmenée en Israël sous un faux prétexte, y avait été vendue à la mafia russe puis revendue au père, qui l'avait forcée à se prostituer. Elle avait alors été enfermée, battue par le père, violée et menacée. La mère était dans un réel état de peur, on ne pouvait attendre d'elle qu'elle retourne en Israël. Il aurait été complètement inapproprié de renvoyer l'enfant sans sa mère vers un père qui avait acheté et vendu des femmes, et dirigé des activités de prostitution.

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
C. v. C. (Minor: Abduction: Rights of Custody Abroad) [1989] 1 WLR 654 [Référence INCADAT: HC/E/UKe 34]

Re C. (Abduction: Grave Risk of Psychological Harm) [1999] 1 FLR 1145 [Référence INCADAT: HC/E/UKe 269]

Toutefois, dans un jugement plus récent rendu par une Cour d'appel anglaise, la position adoptée en 1989 dans l'affaire C. v. C. fut précisée. Voir :

Re S. (A Child) (Abduction: Grave Risk of Harm) [2002] 3 FCR 43, [2002] EWCA Civ 908 [Référence INCADAT: HC/E/UKe 469]

Dans cette affaire, il fut décidé que le refus de la mère de retourner dans l'État où l'enfant avait sa résidence habituelle était susceptible de déclencher le jeu de l'exception en ce qu'il n'était pas imputable à un comportement excessif mais à une maladie dont elle souffrait. Il convient de noter qu'une ordonnance de retour fut malgré tout rendue. On peut également mentionner à ce sujet les décisions de la Cour Suprême du Royaume-Uni dans Re E. (Children) (Abduction: Custody Appeal) [2011] UKSC 27, [2012] 1 A.C. 144 [Référence INCADAT: HC/E/UKe 1068] et Re S. (A Child) (Abduction: Rights of Custody) [2012] UKSC 10, [2012] 2 A.C. 257 [Référence INCADAT: HC/E/UKe 1147]. Dans cette dernière affaire, il fut accepté que les angoisses d'une mère concernant son retour satisfaisaient le niveau de risque requis à l'article 13(1)(b) et justifiaient le jeu de cette exception quoiqu'elles n'étaient pas fondées sur un risque objectif. L'ampleur de ces angoisses était telle qu'elles lui auraient probablement causé des difficultés à assumer normalement son rôle de parent en cas de retour, au point de rendre la situation de l'enfant intolérable.

Allemagne
Oberlandesgericht Dresden, 10 UF 753/01, 21 January 2002 [Référence INCADAT: HC/E/DE 486]

Oberlandesgericht Köln, 21 UF 70/01, 12 April 2001 [Référence INCADAT: HC/E/DE 491]

Auparavant, une position beaucoup plus libérale avait été adoptée :

Oberlandesgericht Stuttgart, 17 UF 260/98, 25 November 1998 [Référence INCADAT: HC/E/DE 323]

Suisse
5P_71/2003/min, II. Zivilabteilung, arrêt du TF du 27 mars 2003 [Référence INCADAT: HC/E/CH 788]

5P_65/2002/bnm, II. Zivilabteilung, arrêt du TF du 11 avril 2002 [Référence INCADAT: HC/E/CH 789]

5P_367/2005/ast, II. Zivilabteilung, arrêt du TF du 15 novembre 2005 [Référence INCADAT: HC/E/CH 841]

5A_285/2007/frs, IIe Cour de droit civil, arrêt du TF du 16 août 2007 [Référence INCADAT: HC/E/CH 955]

5A_479/2012, IIe Cour de droit civil, arrêt du TF du 13 juillet 2012 [Référence INCADAT: HC/E/CH 1179]

Nouvelle-Zélande
K.S. v. L.S. [2003] 3 NZLR 837 [Référence INCADAT: HC/E/NZ 770]

Royaume-Uni - Écosse
McCarthy v. McCarthy [1994] SLT 743 [Référence INCADAT: HC/E/UKs 26]

Etats-Unis d'Amérique
Panazatou v. Pantazatos, No. FA 96071351S (Conn. Super. Ct., 1997) [Référence INCADAT: HC/E/USs 97]

Dans d'autres États contractants, la position adoptée quant aux arguments tendant au non-retour de l'enfant a varié :

Australie
En Australie, la jurisprudence ancienne témoigne d'une position initialement très stricte. Voir :

Director-General Department of Families, Youth and Community Care and Hobbs, 24 September 1999, Family Court of Australia (Brisbane) [Référence INCADAT: HC/E/AU 294]

Director General of the Department of Family and Community Services v. Davis (1990) FLC 92-182 [Référence INCADAT: HC/E/AU 293]

Dans l'affaire State Central Authority v. Ardito, 20 October 1997 [Référence INCADAT: HC/E/AU 283], le Tribunal de Melbourne avait estimé qu'il y avait bien un risque grave de danger alors que la mère refusait de rentrer avec l'enfant. En l'espèce, toutefois, la mère ne pouvait pas retourner aux États-Unis, État de résidence habituelle de l'enfant, car les autorités de ce pays lui refusaient l'entrée sur le territoire.

Plus récemment, suite à la décision de la Cour suprême qui avait été saisie des appels joints dans D.P. v. Commonwealth Central Authority; J.L.M. v. Director-General, NSW Department of Community Services [2001] HCA 39, (2001) 180 ALR 402 [Référence INCADAT: HC/E/AU 346, 347], les tribunaux ont accordé une attention plus particulière à la situation à laquelle l'enfant allait devoir faire face après son retour.

Pour une illustration de ce phénomène dans une affaire où le parent ayant la responsabilité principale de l'enfant refusait de rentrer avec lui dans l'État de sa résidence habituelle, voir : Director General, Department of Families v. RSP. [2003] FamCA 623 [Référence INCADAT: HC/E/AU 544].

France
Dans la jurisprudence française, l'interprétation permissive de l'article 13(1)(b) qui prévalait initialement a été remplacée par une interprétation beaucoup plus stricte. Pour une illustration de l'interprétation permissive initiale. Voir :

Cass. Civ 1ère 12. 7. 1994, S. c. S.. See Rev. Crit. 84 (1995), p. 96 note H. Muir Watt; JCP 1996 IV 64 note Bosse-Platière, Defrénois 1995, art. 36024, note J. Massip [Référence INCADAT: HC/E/FR 103]

Cass. Civ 1ère, 22 juin 1999, No de RG 98-17902 [Référence INCADAT: HC/E/FR 498]

et pour une illustration de l'interprétation plus stricte, voir :

Cass Civ 1ère, 25 janvier 2005, No de RG 02-17411 [Référence INCADAT: HC/E/FR 708]

CA Agen, 1 décembre 2011, No de RG 11/01437 [Référence INCADAT: HC/E/FR 1172]

Israël
Il existe dans la jurisprudence israélienne des exemples contrastés du traitement des exceptions au retour :

Civil Appeal 4391/96 Ro v. Ro [Référence INCADAT: HC/E/IL 832]  contrastant avec :

Family Appeal 621/04 D.Y v. D.R [Référence INCADAT: HC/E/IL 833]

Pologne
Decision of the Supreme Court, 7 October 1998, I CKN 745/98 [Référence INCADAT: HC/E/PL 700]

La Cour Suprême nota qu'il ne serait pas conforme à l'intérêt supérieur de l'enfant de la priver des soins de sa mère, si celle-ci décidait de rester en Pologne. La Cour affirma cependant que si l'enfant devait rester en Pologne, il serait tout autant contraire à son intérêt d'être privée des soins de son père. Tenant compte de ces considérations, la Cour conclut qu'il ne pouvait pas être présumé qu'ordonner le retour de l'enfant la placerait dans une situation intolérable.

Decision of the Supreme Court, 1 December 1999, I CKN 992/99 [Référence INCADAT: HC/E/PL 701]

La Cour suprême précisa que l'argument fréquemment avancé de la potentielle séparation entre l'enfant et le parent ravisseur ne justifiait pas, en principe, le jeu de l'exception. La Cour jugea qu'en l'absence d'obstacles objectifs au retour du parent ravisseur, on pouvait présumer que celui-ci accordait plus de valeur à ses propres intérêts qu'à ceux de l'enfant.

La Cour ajouta que la crainte pour le parent ravisseur de voir sa responsabilité pénale engagée ne constituait pas un obstacle objectif au retour, puisque celui-ci aurait dû avoir conscience des conséquences de ses actions. La situation était cependant plus compliquée s'agissant des nourrissons. La Cour estima que le lien spécial unissant la mère et le nourrisson ne rendait la séparation possible qu'en cas exceptionnel, et ce même en l'absence d'obstacle objectif au retour de la mère dans l'État de résidence habituelle. La Cour jugea que lorsque la mère d'un nourrisson refusait de revenir avec lui, quelles qu'en soient les raisons, alors le retour devait être refusé sur la base de l'article 13(1)(b). D'après les faits de l'espèce, le retour avait été ordonné.

Uruguay
Solicitud conforme al Convenio de La Haya sobre los Aspectos Civiles de la Sustracción Internacional de Menores - Casación, IUE 9999-68/2010 [Référence INCADAT: HC/E/UY 1185]

Cour européenne des droits de l'homme (CourEDH)
Il existe des décisions de la CourEDH adoptant une position stricte relativement à la compatibilité des exceptions de la Convention de La Haye avec la Convention européenne des Droits de l'Homme (CEDH). Dans certaines de ces affaires, des arguments relatifs à l'exception pour risque grave étaient considérés, y compris lorsque le parent ravisseur indiquait son refus d'accompagner le retour de l'enfant. Voir :

Ilker Ensar Uyanık c. Turquie (Application No 60328/09) [Référence INCADAT: HC/E/ 1169]

Dans cette affaire, la CourEDH confirma un recours du père à qui l'enfant avait été enlevé selon lequel les juridictions turques avaient commis une violation de l'article 8 de la CEDH en refusant d'ordonner le retour de son enfant. La CourEDH jugea que, bien que le très jeune âge d'un enfant soit un critère à prendre en compte dans la détermination de son intérêt, cela ne constituait pas en soi, selon les exigences de la Convention de La Haye, un motif suffisant pour justifier le rejet d'une demande de retour.

Il a parfois été fait recours à des témoignages d'expert afin de faciliter l'évaluation des conséquences potentielles de la séparation entre l'enfant et le parent ravisseur. Voir :

Maumousseau and Washington v. France (Application No 39388/05) of 6 December 2007 [Référence INCADAT: HC/E/ 942]

Lipowsky and McCormack v. Germany (Application No 26755/10) of 18 January 2011 [Référence INCADAT: HC/E/ 1201]

MR and LR v. Estonia (Application No 13420/12) of 15 May 2012 [Référence INCADAT: HC/E/ 1177]

Cependant, il faut également noter que, depuis la décision de la Grande Chambre dans l'affaire Neulinger et Shuruk c Suisse, il est des exemples où une approche moins stricte est suivie. Dans le contexte d'une demande de retour, ce dernier jugement avait placé l'accent sur l'intérêt supérieur de l'enfant enlevé et sur le fait de vérifier que les autorités nationales compétentes avaient conduit un examen détaillé de la situation familiale dans son ensemble ainsi qu'une appréciation équilibrée et raisonnable de tous les intérêts en jeu. Voir :

Neulinger and Shuruk v. Switzerland (Application No 41615/07), Grand Chamber, of 6 July 2010 [Référence INCADAT: HC/E/ 1323]

X. v. Latvia (Application No 27853/09) of 13 December 2011 [Référence INCADAT: HC/E/ 1146]; et décision de la Grand Chamber X. v. Latvia (Application No 27853/09), Grand Chamber [Référence INCADAT: HC/E/ 1234]

B. v. Belgium (Application No 4320/11) of 10 July 2012 [Référence INCADAT: HC/E/ 1171]

Dans cette affaire, la CourEDH estima à la majorité que le retour d'un enfant aux Etats-Unis d'Amérique entrainerait une violation de l'article 8 de la CEDH. Il fut jugé que le processus de prise de décision de la Cour d'appel belge, en ce qui concerne l'article 13(1)(b), n'avait pas satisfait aux exigences procédurales posées par l'article 8 de la CEDH. Les deux juges dissidents notèrent cependant que le danger visé par l'article 13 ne saurait résulter de la seule séparation de l'enfant et du parent ravisseur.

(Auteur: Peter McEleavy, avril 2013)

Âge et maturité requis

L’article 13(2) ne prévoit pas d’âge minimum à partir duquel il convient de s’enquérir des objections de l’enfant, il applique plutôt une formule qui indique que l’enfant doit avoir « atteint un âge et une maturité où il se révèle approprié de tenir compte de cette opinion ». Néanmoins, en formulant cette exception, les rédacteurs de la Convention avaient principalement en tête les adolescents qui ne souhaitent pas retourner dans leur État d’origine.

Indubitablement influencées par les pratiques internes en droit de la famille, différentes tendances se sont développées dans les États contractants quant à la manière d’appliquer cette exception. En outre, au fil de l’application de la Convention dans les États, ces tendances ont connu des évolutions, en particulier au fur et à mesure que les enfants ont été reconnus en qualité d’acteurs juridiques à part entière de leurs propres droits. En effet, au sein de l’Union européenne (UE), à tout le moins eu égard aux enlèvements cantonnés au territoire de l’UE, l’on doit veiller à ce que l’enfant ait la possibilité d’être entendu, à moins que cela n’apparaisse inapproprié eu égard à son âge ou son degré de maturité : Règlement Bruxelles II bis, art. 11(2).

La question de l’âge et de la maturité est étroitement liée au seuil appliqué dans le cadre de cette exception, autrement dit au critère utilisé pour déterminer les circonstances dans lesquelles il peut sembler approprié de prendre en compte les objections de l’enfant, voir par exemple Re T. (Enlèvement : Objection de l’enfant au retour) [2000] 2 FLR 192 [INCADAT cite HC/E/UKe 270] ; Zaffino v. Zaffino [2006] 1 FLR 410 [INCADAT cite HC/E/UKe 813]; W. v. W. 2004 S.C. 63 IH (1 Div) [INCADAT cite: HC/E/UKs 805]; White v. Northumberland [2006] NZFLR 1105, [INCADAT cite: HC/E/NZ 902].

Australie

H.Z. v. State Central Authority [2006] Fam CA 466, INCADAT cite: HC/E/AU 876

Un enfant de huit ans a présenté des objections qui allaient au-delà d’une simple expression de sa préférence ou de souhaits ordinaires. Néanmoins, compte tenu de son âge et de son degré de maturité, il ne serait pas approprié de prendre son point de vue en considération.

Director-General, Department of Families, Youth and Community Care v. Thorpe (1997) FLC 92-785 INCADAT cite: HC/E/AU 212]

Reconnaissance du bien-fondé des objections d’un enfant de neuf ans.

Allemagne

4 UF 223/98, Oberlandesgericht Düsseldorf, [INCADAT cite: HC/E/DE 820]

Aucun âge limite fixé. Il a été jugé que l’enfant de huit ans manquait de maturité.

93 F 178/98 HK, Familengericht Flensburg (Family Court), 18 septembre 1998, [INCADAT cite: HC/E/DE 325]

Recueil des objections d’un enfant de six ans, mais elles n’ont pas été retenues.

Irlande

In the Matter of M. N. (A Child) [2008] IEHC 382, [INCADAT cite: HC/E/IE 992

Examen détaillé de l’âge à partir duquel il convient d’entendre l’enfant conformément à l’article 11(2) du Règlement Bruxelles II bis (Règlement du Conseil (CE) No 2201/2003 du 27 novembre 2003). Ordre de prendre en considération le point de vue d’un enfant de six ans.

Nouvelle-Zélande

U. v. D. [2002] NZFLR 529, INCADAT cite: HC/E/NZ 472

Recueil des objections d’un enfant de sept ans, mais elles n’ont pas été retenues.

Suisse

5P.1/2005 /bnm, Bundesgericht, II. Zivilabteilung (Tribunal Fédéral, 2ème Chambre Civile), [INCADAT cite: HC/E/CH 795

Pas d’âge minimum. Audition d’enfants âgés de neuf ans et demi et dix ans et demi, mais leurs objections n’ont pas été retenues.

5P.3/2007 /bnm, Bundesgericht, II. Zivilabteilung, [INCADAT cite: HC/E/CH 894

L’on considèrera qu’un enfant dispose de la maturité suffisante s’il est en mesure de comprendre la nature de la procédure de retour. Il n’a pas été possible de donner des directives générales quant à l’âge minimum à partir duquel un enfant serait capable de comprendre une question si abstraite. Le tribunal a toutefois constaté que les recherches dans le domaine de la psychologie enfantine avaient tendance à indiquer qu’un enfant ne serait capable d’avoir un tel raisonnement qu’à partir de 11 ou 12 ans. La Cour d’appel était donc en droit de ne pas recueillir les avis d’enfants âgés de neuf et sept ans.

Royaume-Uni - Angleterre & Pays de Galle

Re W (Minors) [2010] EWCA 520 Civ, [INCADAT cite: HC/E/UKs 1324

Prise en compte des objections de deux enfants de huit et presque six ans.

Le tribunal a admis que les objections d’un enfant de six ans tombant sous le coup de l’exception ne correspondaient pas à ce que les rédacteurs avaient envisagé. Cependant, Wilson L.J. a conclu « [… qu’]au cours des 30 dernières années, la nécessité de prendre des décisions à l’égard d’enfants de plus en plus jeunes qui ne correspondent pas nécessairement à leurs souhaits, mais dans tous les cas, à la lumière de ces souhaits, s’était imposée » [traduction du Bureau Permanent].

Royaume-Uni - Écosse

N.J.C. v. N.P.C. [2008] CSIH 34, 2008 S.C. 571, [INCADAT cite: HC/E/UKs 996

Pas d’audition d’un enfant de neuf ans et demi ; pas de prise en compte des objections de ses frères et sœurs de 11 et 15 ans.

W. v. W. 2004 S.C. 63 IH (1 Div) [INCADAT cite: HC/E/UKs 805]

Il a été jugé qu’une enfant de neuf ans n’était pas suffisamment mature pour que l’on prenne en compte son avis – décision du juge de première instance annulée.

États-Unis d’Amérique

Blondin v. Dubois, 238 F.3d 153 (2d Cir. 2001) INCADAT cite: HC/E/USf 585]

Pas d’âge minimum à partir duquel il convient de prendre en considération les objections d’un enfant. Prise en compte des objections d’un enfant de huit ans, dans le contexte de l’examen de l’exception de l’article 13(1)(b).

Escobar v. Flores 183 Cal. App. 4th 737 (2010), [INCADAT cite: HC/E/USs 1026]

Pas d’âge minimum à partir duquel il convient de prendre en considération les objections d’un enfant. Prise en compte des objections d’un enfant de huit ans.

Exigence de traitement rapide de la demande (art. 11)

Résumé INCADAT en cours de préparation.