HC/E/CA 368
Canada
Ontario Court; Provincial Division (Tribunal provincial de l'Ontario - Canada)
Première instance
El Salvador
Canada
18 July 1990
Définitif
Objectifs de la Convention - Préambule, art. 1 et 2 | Risque grave - art. 13(1)(b)
-
-
-
Alors que l'affaire ne relevait pas de la Convention de La Haye, le juge indiqua qu'en incorporant les dispositions conventionnelles dans la législation de l'Ontario, la province avait formellement et clairement déclaré son soutien au principe selon lequel il convenait de décourager les enlèvements internationaux d'enfants et laisser les juridictions de l'Etat de la résidence habituelle des enfants statuer sur la question de la garde. La première question concernait le fait que les services de l'immigration canadienne avaient donné au père et aux enfants le statut de réfugiés. Le juge indiqua qu'il convenait d'attacher une grande importance à cette décision et qu'il convenait de ne pas la remettre en cause. Toutefois, le juge estima que la demande dont il était saisi était de nature différente. Il ajouta que la mère n'avait d'ailleurs pas été partie à la procédure d'immigration et que le père avait fait de la rétention d'informations. Le juge décida que tout conflit entre les questions d'immigration et d'enlèvements d'enfants devait être résolu en faveur des principes auxquels la province de l'Ontario était attachée, lesquels sont incorporés dans la Convention de La Haye.
Les recherches menées par le Bureau de documentation des services de l'immigration indiquaient que le Savador était un pays dans lequel la situation sociale et politique était instable. Toutefois, le juge considéra que le père n'avait pas rapporté la preuve que les enfants seraient mis en danger en cas de retour. Au moment du déplacement, ils vivaient dans un environnement calme et serein ; ils étaient heureux et équilibrés avec leur mère, n'avaient jamais subi de préjudice et rien ne laissait supposer qu'ils puissent être en danger. Le jue estima que le déménagement du père avait, au moins en partie, été dicté par des considérations économiques.
Une exception de l'article 13(1)(b) a parfois été invoquée mettant en cause non pas un risque individuel pour l'enfant mais résultant des conditions de vie dans l'État de la résidence habituelle.
Dans l'arrêt d'appel fameux rendu aux États-Unis d'Amérique dans Friedrich v. Friedrich, 78 F.3d 1060 (6th Cir. 1996) [Référence INCADAT : HC/E/USf 82], la Cour constata entre autres qu'un risque grave ne pouvait être pris en compte que lorsque le retour est de nature à exposer l'enfant à un danger immédiat pouvant se matérialiser avant la résolution de la question de la garde, par exemple dans le cas où l'enfant est renvoyé dans une zone de guerre ou de famine.
La question s'est notamment posée au regard d'un retour en Israël.
Retour en Israël
La question de savoir si le retour d'enfants en Israël est de nature à les exposer à un risque grave de danger a divisé les tribunaux appelés à se prononcer sur ce point. Une majorité de juridictions a considéré que ce n'était pas le cas. Voir :
Argentine
A. v. A [Référence INCADAT : HC/E/AR 487]
Australie
Kilah & Director-General, Department of Community Services [2008] FamCAFC 81 [Référence INCADAT : HC/E/AU 995]
Belgique
N° 03/3585/A, Tribunal de première instance de Bruxelles, 17/4/2003 [Référence INCADAT : HC/E/BE 547]
Canada
Docket No 1 F 3709/00; C., 4 décembre 2001, Superior Court of Justice, Ontario, Court File No 01-FA-10575
Danemark
V.L.K., 11. januar 2002, 13. afdeling, B-2939-01, Vestre Landsret; High Court, Western Division [Référence INCADAT : HC/E/DK 519]
Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re S. (A Child) (Abduction: Grave Risk of Harm) [2002] 3 FCR 43, [2002] EWCA Civ 908 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 469]
France
CA Aix en Provence, 8 octobre 2002, No de RG 02/14917 [Référence INCADAT : HC/E/FR 509]
Allemagne
1 F 3709/00, Familiengericht Zweibrücken (Family Court), 25 January 2001 [Référence INCADAT: HC/E/DE 392]
États-Unis d'Amérique
Freier v. Freier, 969 F. Supp. 436 (E.D. Mich. 1996) [Référence INCADAT : HC/E/USf 133]
Toutefois, l'argument a été accueilli dans certaines affaires :
Australie
Janine Claire Genish-Grant and Director-General Department of Community Services [2002] FamCA 346 [Référence INCADAT : HC/E/AU 458]
États-Unis d'Amérique
Silverman v. Silverman, 2002 U.S. Dist. LEXIS 8313 [Référence INCADAT : HC/E/USf 481] (voir néanmoins Silverman v. Silverman, 338 F.3d 886 (8th Cir. 2003) [Référence INCADAT : HC/E/US 530]
Retour au Zimbabwe
La Chambre des Lords britannique, instance suprême du Royaume-Uni a rejeté l'argument selon lequel le climat politique et moral était tel au Zimbabwe que le retour d'enfants dans ce pays serait de nature à les exposer à un risque grave de danger psychologique ou à une situation intolérable.
Re M. (Abduction: Zimbabwe) [2007] UKHL 55, [2008] 1 AC 1288 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 937].
Retour au Mexique
CA Rennes, 28 juin 2011, No de RG 11/02685 [Référence INCADAT : HC/E/FR 1129]
La mère citait la pollution existant à Mexico, l'insécurité générée par la délinquance dans la métropole de Mexico ainsi que les risques sismiques. Toutefois elle ne montrait pas en quoi ces risques touchaient personnellement et directement les enfants. Elle n'avait pas mentionné ces facteurs pour justifier son choix de s'établir en France dans un document adressé au père en 2010, mais avait fait état de difficultés financières et familiales. En outre, la Cour nota que ces facteurs ne l'avaient pas dissuadé de vivre à Mexico de 1998 à 2010 et d'y avoir élevé deux enfants. Elle releva encore que la mère n'avait pas cru opportun de demander l'autorisation aux autorités mexicaines de s'établir en France avec les enfants, sans expliquer les raisons qui, selon elle, pourraient compromettre son droit à un procès équitable au Mexique.
La Cour clarifia qu'elle n'affirmait pas que les éléments soulevés par la mère étaient dénués de fondement. Ils pourraient être éventuellement utilisés dans le cadre de la question de la garde, mais ne suffisaient pas à établir l'existence d'un risque grave de danger.
(Auteur du résumé : Peter McEleavy, Avril 2013)
Lorsqu'un parent demande le retour d'un enfant dans une situation ne relevant pas de la Convention de La Haye ni d'un autre instrument international ou régional, le tribunal saisi doit mettre en balance l'intérêt de l'enfant et le principe international selon lequel les États doivent prendre des mesures en vue de lutter contre les déplacements et non-retours illicites d'enfants à l'étranger (art. 11(1) de la Convention des Nations Unies sur les Droits de l'enfant de 1990).
Canada
Shortridge-Tsuchiya v. Tsuchiya, 2009 BCSC 541, [2009] B.C.W.L.D. 4138, [Référence INCADAT : HC/E/CA 1109].
Royaume-Uni : Angleterre et Pays de Galles
Les juges d'appel ont développé des approches discordantes sur cette question.
Dans les affaires suivantes, la cour d'appel a privilégié une vision internationaliste analogue à celle de la Convention de La Haye :
Re E. (Abduction: Non-Convention Country) [1999] 2 FLR 642 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 589] ;
Re J. (Child Returned Abroad: Human Rights) - [2004] 2 FLR 85 [2004] EWCA Civ. 417 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 586].
Toutefois dans l'affaire plus ancienne de Re J.A. (Child Abduction: Non-Convention Country) [1998] 1 FLR 231 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 588] le retour n'avait pas été prononcé au motif qu'il était douteux que l'État de la résidence habituelle puisse agir dans l'intérêt supérieur de l'enfant. En l'espèce la mère, auteur de l'enlèvement et ressortissante britannique, n'aurait pas été autorisée à quitter l'État de la résidence habituelle sans le consentement du père.
Dans Re J. (A child) (Return to foreign jurisdiction: convention rights), [2005] UKHL 40, [2006] 1 AC 80, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 801], la Chambre des Lords approuva expressément l'approche privilégiée dans Re J.A. (Child Abduction: Non-Convention Country) [1998] 1 FLR 231 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 588].
La Chambre des Lords indiqua que le principe sous-tendant la Convention de La Haye impliquait nécessairement que dans certains cas l'État de refuge devait prendre des mesures qui n'étaient pas dans l'intérêt supérieur de l'enfant en cause. Les États contractants avaient accepté cet état de fait parce que la Convention permettait d'atteindre l'intérêt supérieur des enfants en général. Néanmoins, la Chambre des Lords rappela que ni la loi ni les précédents judiciaires ne prévoyaient l'extension des principes de la Convention de La Haye aux États non contractants. Dans les affaires ne relevant pas de conventions internationales le juge devait agir dans l'intérêt supérieur de l'enfant en cause. Quoiqu'il n'y ait pas de présomption forte en faveur du retour il convient d'étudier au cas par cas si le retour immédiat de l'enfant n'est pas dans son intérêt supérieur.
Il convient de souligner que dans l'affaire Re F. (Children) (Abduction: Removal Outside Jurisdiction) [2008] EWCA Civ. 842, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 982] un juge revint sur sa décision d'ordonner le retour notamment en raison de l'affaire Re M. La Cour d'appel ne discuta toutefois pas la décision de la Chambre des Lords, insistant sur des éléments nouveaux qui montraient qu'il était inévitable que la mère soit renvoyée dans son pays vu son statut d'immigration.
Dans E.M. (Lebanon) v. Secretary of State for the Home Department [2008] UKHL 64, [2008] 3 W.L.R. 931, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 994], un enfant avait été enlevé de son pays de résidence habituelle, qui n'était pas partie à aucune convention relative à l'enlèvement. Il s'agissait en l'espèce d'une affaire d'immigration. La demande d'asile de la mère avait été refusée mais son argument selon lequel le retour aurait violé son droit et le droit de son enfant au respect de la vie familiale selon l'article 8 de la Convention européenne des Droits de l'Homme (CEDH) avait finalement prévalu. Toutefois, il importe de noter qu'en l'espèce la vie familiale de l'enfant se résumait à sa vie avec sa mère puisque que le père n'avait eu aucun contact avec lui depuis sa naissance. Par une majorité de 4 contre 1, les juges estimèrent que le droit de la famille libanais, quoique de nature discriminatoire puisqu'il imposait le transfert automatique de la responsabilité de l'enfant de la mère au père le jour de son 7ème anniversaire, ne violait pas en principe la CEDH.