HC/E/UKe 982
Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Court of Appeal (civil division)
Deuxième Instance
Mozambique
Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
22 July 2008
Définitif
Questions ne relevant pas de la Convention
Recours accueilli, retour ordonné
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Le père faisait valoir que le premier juge n'aurait pas dû accorder autant d'importance au bien-être à court terme des enfants étant donné les risques encourus au moyen et long terme. Les enfants ne pourraient pas demeurer au Royaume-Uni. Le père critiquait également les conclusions du juge quant à l'intégration au motif qu'une importance insuffisante avait été accordée aux aspects émotionnels et psychologiques. Enfin, il arguait que les questions de principe auraient également dû être envisagées plus avant. La Cour d'appel décida que les arguments du père était plus convaincants que ceux de la mère. Elle attacha une grande importance à des éléments de preuve nouveaux qui révélaient la précarité de la présence de la mère en Angleterre. Les enfants n'avaient en conséquence réalistiquement aucune chance de rester au Royaume-Uni. En outre, renvoyer les enfants au Mozambique dans le cadre de cette instance permettait d'éviter que la mère et les enfants soient déportés à la République démocratique du Congo, dont la mère était ressortissante. Le retour fut ordonné à la condition que des mesures de protection soient mises en place au Mozambique avant que les enfants n'y rentrent.
La notion d'intégration ne fait pas encore l'objet d'une interprétation uniforme. La question se pose notamment de savoir si l'intégration doit s'entendre littéralement ou être interprétée à la lumière des objectifs de la Convention. Dans les États faisant prévaloir la deuxième alternative, la charge de la preuve est plus lourde pour le parent ravisseur et l'exception d'application plus rare.
Parmi les États les plus exigeants en ce qui concerne la preuve de l'intégration de l'enfant, on peut citer :
Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re N. (Minors) (Abduction) [1991] 1 FLR 413, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 106] ;
Dans cette espèce, il fut décidé que la notion d'intégration dépassait celle d'adaptation au nouveau milieu. L'intégration implique un élément de relation physique avec une communauté et un environnement. Elle contient un élément émotionnel traduisant la sécurité et la stabilité.
Cannon v. Cannon [2004] EWCA CIV 1330, [2005] 1 FLR 169 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 598].
Pour un commentaire critique de Re N., voir :
L.Collins et al., Dicey, Morris & Collins on the Conflict of Laws: fourteenth edition, London, Sweet & Maxwell, 2006, para. 19 à 121.
Il convient toutefois de noter que plus récemment l'Angleterre a vu se développer une analyse de la notion d'intégration centrée sur l'enfant. On se réfèrera à la décision de la Chambre des Lords dans Re M. (Children) (Abduction: Rights of Custody) [2007] UKHL 55, [2008] 1 AC 1288, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 937]. Cette décision pourrait remettre en cause la jurisprudence antérieure.
Toutefois cette décision n'a apparemment pas affaibli les exigences posées en la matière par la Common Law comme en témoigne Re F. (Children) (Abduction: Removal Outside Jurisdiction) [2008] EWCA Civ. 842, [2008] 2 F.L.R. 1649 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 982].
Royaume-Uni - Écosse
Soucie v. Soucie 1995 SC 134, [Référence INCADAT : HC/E/UKs 107]
Pour que l'article 12(2) trouve à s'appliquer, il faut que l'intérêt qu'a l'enfant à rester dans son nouveau milieu soit si fort qu'il dépasse l'objectif premier de la Convention selon lequel il appartient au juge du lieu de la résidence habituelle qu'avait l'enfant au moment de l'enlèvement de décider de l'avenir de celui-ci.
P. v. S., 2002 FamLR 2 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 963]
L'intégration existe dans les situations stables, dont on peut s'attendre qu'elles durent. Il convient d'opérer une certaine projection dans l'avenir.
C. v. C. [2008] CSOH 42, [Référence INCADAT : HC/E/UKs 962]
États-Unis d'Amérique
In re Interest of Zarate, No. 96 C 50394 (N.D. Ill. Dec. 23, 1996), [Référence INCADAT : HC/E/USf 134]
Une interprétation littérale du concept d'intégration a été préférée dans les États suivants :
Australie
Director-General, Department of Community Services v. M. and C. and the Child Representative (1998) FLC 92-829; [Référence INCADAT : HC/E/AU 291];
Chine (Région administrative spéciale de Hong Kong)
A.C. v. P.C. [2004] HKMP 1238, [Référence INCADAT : HC/E/HK 825]
L'impact de la différence d'interprétation est sans doute plus marqué lorsque ce sont des jeunes enfants qui sont en cause.
Il a été décidé que l'intégration doit s'apprécier du point de vue du jeune enfant en :
Autriche
7Ob573/90 Oberster Gerichtshof, 17/05/1990, [Référence INCADAT : HC/E/AT 378] ;
Australie
Secretary, Attorney-General's Department v. T.S. (2001) FLC 93-063, [Référence INCADAT : HC/E/AU 823] ;
State Central Authority v. C.R. [2005] Fam CA 1050, [Référence INCADAT : HC/E/AU 824] ;
Israël
Family Application 000111/07 Ploni v. Almonit, [Référence INCADAT : HC/E/IL 938] ;
Monaco
R 6136; M. Le Procureur Général contre M. H. K, [Référence INCADAT : HC/E/MC 510] ;
Suisse
Präsidium des Bezirksgerichts St. Gallen (Cour cantonale de St. Gallen) (Suisse), décision du 8 Septembre 1998, 4 PZ 98-0217/0532N, [Référence INCADAT : HC/E/CH 431].
Une approche centrée sur l'enfant a également été adoptée dans des décisions importantes rendues à propos d'enfants plus grands, l'accent étant mis sur l'opinion de l'enfant.
Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re M. (Children) (Abduction: Rights of Custody) [2007] UKHL 55, [2008] 1 AC 1288, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 937];
France
CA Paris 27 Octobre 2005, 05/15032, [Référence INCADAT : HC/E/FR 814];
Québec
Droit de la Famille 2785, Cour d'appel de Montréal, 5 décembre 1997, No 500-09-005532-973 [Référence INCADAT : HC/E/CA 653].
En revanche, c'est une analyse plus objective de l'intégration qui a été préférée aux États-Unis d'Amérique :
David S. v. Zamira S., 151 Misc. 2d 630, 574 N.Y.S. 2d 429 (Fam. Ct. 1991), [Référence INCADAT : HC/E/USs 208];
Les enfants, âgés de 3 ans et 1 an ½ n'avaient pas établi de liens importants dans leur nouveau milieu de Brooklyn. Ils ne participaient pas aux activités scolaires, extrascolaires, religieuses, sociales ou communautaires auxquelles des enfants plus âgés se livrent.
Une pratique s'est fait jour dans un certain nombre d'États contractants dans lesquels l'ordonnance de retour est prononcée sous réserve du respect de certaines exigences ou de certains engagements. Afin de s'assurer que ces mesures de protection sont susceptibles d'être exécutées, il peut être exigé du demandeur qu'il fasse enregistrer ces mesures en des termes identiques ou équivalents auprès des autorités de l'État de la résidence habituelle de l'enfant. Ces décisions sont généralement décrites comme des ordonnances « assurant le retour sans danger de l'enfant » ou « ordonnances miroir ».
Des ordonnances de retour ont été rendues par les juridictions suivantes sous réserve du prononcé d'une ordonnance assurant le retour sans danger de l'enfant ou d'une ordonnance miroir :
Australie
Director-General Department of Families, Youth and Community Care and Hobbs, 24 September 1999, Family Court of Australia (Brisbane) [Référence INCADAT : HC/E/AU 294] ;
Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re W. (Abduction: Domestic Violence) [2004] EWHC 1247, [2004] 2 FLR 499 [Référence INCADAT : HC/E/ UKe 599] ;
Re F. (Children) (Abduction: Removal Outside Jurisdiction) [2008] EWCA Civ. 842, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 982] ;
Afrique du Sud
Sonderup v. Tondelli 2001 (1) SA 1171 (CC) [Référence INCADAT : HC/E/ZA 309] ;
Central Authority v. Houwert [2007] SCA 88 (RSA); [Référence INCADAT : HC/E/ZA 900].
Une demande déposée par la High Court anglaise concernant des mesures de protection prises dans le cadre d'une décision relative aux termes d'un droit de visite international et enregistrées dans l'État où les périodes de visite devaient se dérouler a été reprise et prolongée au Panama dans la décision :
Ruling Nº393-05-F [Référence INCADAT : HC/E/PA 872].
Une demande sollicitant le retour d'un enfant sous réserve qu'une ordonnance miroir soit rendue dans l'État d'origine fut rejetée par les juridictions israéliennes dans Family Application 8743/07 Y.D.G. v. T.G., [Référence INCADAT : HC/E/IL 983], les accusations formulées à l'encontre du père ayant été déclarées sans fondement.
Résumé INCADAT en cours de préparation.
Lorsqu'un parent demande le retour d'un enfant dans une situation ne relevant pas de la Convention de La Haye ni d'un autre instrument international ou régional, le tribunal saisi doit mettre en balance l'intérêt de l'enfant et le principe international selon lequel les États doivent prendre des mesures en vue de lutter contre les déplacements et non-retours illicites d'enfants à l'étranger (art. 11(1) de la Convention des Nations Unies sur les Droits de l'enfant de 1990).
Canada
Shortridge-Tsuchiya v. Tsuchiya, 2009 BCSC 541, [2009] B.C.W.L.D. 4138, [Référence INCADAT : HC/E/CA 1109].
Royaume-Uni : Angleterre et Pays de Galles
Les juges d'appel ont développé des approches discordantes sur cette question.
Dans les affaires suivantes, la cour d'appel a privilégié une vision internationaliste analogue à celle de la Convention de La Haye :
Re E. (Abduction: Non-Convention Country) [1999] 2 FLR 642 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 589] ;
Re J. (Child Returned Abroad: Human Rights) - [2004] 2 FLR 85 [2004] EWCA Civ. 417 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 586].
Toutefois dans l'affaire plus ancienne de Re J.A. (Child Abduction: Non-Convention Country) [1998] 1 FLR 231 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 588] le retour n'avait pas été prononcé au motif qu'il était douteux que l'État de la résidence habituelle puisse agir dans l'intérêt supérieur de l'enfant. En l'espèce la mère, auteur de l'enlèvement et ressortissante britannique, n'aurait pas été autorisée à quitter l'État de la résidence habituelle sans le consentement du père.
Dans Re J. (A child) (Return to foreign jurisdiction: convention rights), [2005] UKHL 40, [2006] 1 AC 80, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 801], la Chambre des Lords approuva expressément l'approche privilégiée dans Re J.A. (Child Abduction: Non-Convention Country) [1998] 1 FLR 231 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 588].
La Chambre des Lords indiqua que le principe sous-tendant la Convention de La Haye impliquait nécessairement que dans certains cas l'État de refuge devait prendre des mesures qui n'étaient pas dans l'intérêt supérieur de l'enfant en cause. Les États contractants avaient accepté cet état de fait parce que la Convention permettait d'atteindre l'intérêt supérieur des enfants en général. Néanmoins, la Chambre des Lords rappela que ni la loi ni les précédents judiciaires ne prévoyaient l'extension des principes de la Convention de La Haye aux États non contractants. Dans les affaires ne relevant pas de conventions internationales le juge devait agir dans l'intérêt supérieur de l'enfant en cause. Quoiqu'il n'y ait pas de présomption forte en faveur du retour il convient d'étudier au cas par cas si le retour immédiat de l'enfant n'est pas dans son intérêt supérieur.
Il convient de souligner que dans l'affaire Re F. (Children) (Abduction: Removal Outside Jurisdiction) [2008] EWCA Civ. 842, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 982] un juge revint sur sa décision d'ordonner le retour notamment en raison de l'affaire Re M. La Cour d'appel ne discuta toutefois pas la décision de la Chambre des Lords, insistant sur des éléments nouveaux qui montraient qu'il était inévitable que la mère soit renvoyée dans son pays vu son statut d'immigration.
Dans E.M. (Lebanon) v. Secretary of State for the Home Department [2008] UKHL 64, [2008] 3 W.L.R. 931, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 994], un enfant avait été enlevé de son pays de résidence habituelle, qui n'était pas partie à aucune convention relative à l'enlèvement. Il s'agissait en l'espèce d'une affaire d'immigration. La demande d'asile de la mère avait été refusée mais son argument selon lequel le retour aurait violé son droit et le droit de son enfant au respect de la vie familiale selon l'article 8 de la Convention européenne des Droits de l'Homme (CEDH) avait finalement prévalu. Toutefois, il importe de noter qu'en l'espèce la vie familiale de l'enfant se résumait à sa vie avec sa mère puisque que le père n'avait eu aucun contact avec lui depuis sa naissance. Par une majorité de 4 contre 1, les juges estimèrent que le droit de la famille libanais, quoique de nature discriminatoire puisqu'il imposait le transfert automatique de la responsabilité de l'enfant de la mère au père le jour de son 7ème anniversaire, ne violait pas en principe la CEDH.