AFFAIRE

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Nom de l'affaire

T.M. c. R.P., Droit de la famille - 08693, Cour supérieure de Montréal, 28 mars 2008, N°500-04-047104-089

Référence INCADAT

HC/E/CA 967

Juridiction

Pays

Canada

Nom

Cour supérieure de Montréal

Degré

Première instance

États concernés

État requérant

Italie

État requis

Canada

Décision

Date

28 March 2008

Statut

Définitif

Motifs

Déplacement et non-retour - art. 3 et 12 | Consentement - art. 13(1)(a) | Risque grave - art. 13(1)(b)

Décision

Retour ordonné

Article(s) de la Convention visé(s)

12 13(1)(a) 13(1)(b)

Article(s) de la Convention visé(s) par le dispositif

13(1)(a) 13(1)(b)

Autres dispositions

-

Jurisprudence | Affaires invoquées

-

Publiée dans

-

INCADAT commentaire

Objectifs et domaine d’application de la Convention

Interprétation de la Convention
Concepts autonomes

Exceptions au retour

Problèmes généraux
Nature limitée des exceptions
Consentement
Qualification du consentement
Établissement du consentement

RÉSUMÉ

Résumé disponible en EN | FR | ES

Faits

La demande concernait une fille née en 2001. Peu après sa naissance, les parents, originaires de pays différents, s'installèrent ensemble dans le pays A.

La famille y vécut jusqu'en décembre 2006. A cette date, la mère et l'enfant allèrent au Canada avec le consentement du père pour y rendre visite aux grands-parents. Il était prévu qu'elles retournent dans le pays A le 14 mars 2007.

Pour des raisons financières, le père déménagea dans une autre ville en février/mars 2007. En mars, la mère rentra seule. Elle ne reprit pas la vie commune avec le père. Le 7 mars 2008, le père demande le retour de l'enfant.

Dispositif

Retour ordonné.

Motifs

Déplacement et non-retour - art. 3 et 12


Selon la mère, la demande de retour était intervenue plus d'un an après le déplacement et l'enfant était bien intégrée dans son nouveau milieu.

Rappelant la jurisprudence Thomson, la Cour indiqua que le non-retour illicite doit être assimilé « au refus de réintégrer l'enfant à son milieu après un séjour à l'étranger » et que le non-retour sera illicite dès l'expiration de la période de visite.

En l'espèce il convenait donc de calculer le délai à partir du 14 mars 2007 (et non à partir de l'arrivée au Canada le 24 décembre 2006). La demande ayant été introduite moins d'un an après cette date, il n'y avait pas lieu de vérifier l'intégration de l'enfant dans son nouveau milieu.

Consentement - art. 13(1)(a)


La mère alléguait que le père avait autorisé le non-retour de l'enfant, soulignant en particulier que la décision de déménager du père montrait que la mère et l'enfant étaient exclues des projets futurs de celui-ci et faisant valoir d'autres arguments inexacts. La Cour ne rentra pas dans le détail de la preuve du consentement.

Elle observa que selon l'article 28 de la loi mettant en œuvre la Convention, « pour déterminer l'existence d'un déplacement ou d'un non-retour illicite, la Cour supérieure peut tenir compte directement du droit et des décisions judiciaires ou administratives reconnues formellement ou non dans l'État désigné où l'enfant a sa résidence habituelle, sans avoir recours aux procédures spécifiques sur la preuve de ce droit ou pour la reconnaissance des décisions étrangères qui seraient autrement applicables ».

A cet égard, elle indiqua que par arrêt du 14 mai 2007, le tribunal des mineurs du pays de résidence habituelle de l'enfant relevait que la mère avait laissé l'enfant au Canada après le 14 mars 2007 « sans l'autorisation du père ». La Cour en déduisit que la preuve n'avait pas été rapportée que le père avait autorisé sans équivoque le non-retour de l'enfant.

Risque grave - art. 13(1)(b)


La mère rapportait la preuve de ce que les parents se querellaient souvent et mentionnait que le père avait plusieurs fois giflé l'enfant pour la réprimander. Le père faisait lui état d'une relation étroite et sereine avec l'enfant.

Citant de nouveau l'arrêt Thomson, la Cour souligna que le risque grave au sens de la Convention s'entendait d'un risque plus grand qu'un risque ordinaire, ou plus grand que ce dont on s'attendrait normalement du fait de prendre un enfant d'un parent et de le remettre à l'autre. Non seulement le risque devait être grave, mais il devait causer un préjudice psychique sérieux, et non pas négligeable.

La Cour estima qu'il n'avait pas été démontré que le risque replissait les exigences sus-mentionnées.

Commentaire INCADAT

Par une décision du même jour, la Cour d'appel du Québec (Montréal) rejeta une requête verbale de la mère en suspension de l'exécution provisoire du présent jugement au motif que la mère n'avait pas démontré que les critères d'application établis par la loi et interprétés par la jurisprudence n'étaient pas satisfaits.

Concepts autonomes

Résumé INCADAT en cours de préparation.

Nature limitée des exceptions

Analyse de la jurisprudence de la base de données INCADAT en cours de préparation.

Qualification du consentement

La question de savoir si le consentement relève de l'article 3 ou de l'article 13(1) a) a posé difficulté. Certaines juridictions considèrent que le consentement est un élément permettant d'apprécier l'illicéité du déplacement ou du non-retour, et l'apprécient donc dans le cadre de l'article 3. Voir :

Australie
In the Marriage of Regino and Regino v. The Director-General, Department of Families Services and Aboriginal and Islander Affairs Central Authority (1995) FLC 92-587 [Référence INCADAT : HC/E/AU @312@];

FranceCA Rouen, 9 mars 2006, N°05/04340, [Référence INCADAT : HC/E/FR 897];

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re O. (Abduction: Consent and Acquiescence) [1997] 1 FLR 924 [Référence INCADAT : HC/E/UKe @54@];

Re P.-J. (Children) [2009] EWCA Civ 588, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 1014].

Bien que la question eût été a priori réglée par la jurisprudence anglaise, selon laquelle le consentement relevait de l'art. 13(1) a), aucun des deux juges de la Cour d'appel siégeant en l'espèce n'est apparu convaincu par cette position.

On peut aussi évoquer des exemples où des tribunaux de première instance n'ont pas fait référence à la distinction entre l'art. 3 et l'art. 13(1) a) mais où le consentement, en tant qu'acceptation initiale du déménagement, a été considéré comme un élément de l'illicéité, voir:

Canada
F.C. c. P.A., Droit de la famille - 08728, Cour supérieure de Chicoutimi, 28 mars 2008, N°150-04-004667-072, [Référence INCADAT : HC/E/CA 969], Cour supérieure de Chicoutimi, 28 mars 2008, N°150-04-004667-072 [Référence INCADAT : HC/E/CA 969];

Suisse
U/EU970069, Bezirksgericht Zürich (Zurich District Court) [Référence INCADAT : HC/E/CH 425]

Royaume-Uni - Écosse
Murphy v. Murphy 1994 GWD 32-1893 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 186].

L'affaire n'a pas été abordée sous l'angle de la distinction entre l'art. 3 et l'art. 13(1) a), mais étant donné que le père avait initialement accepté le déménagement, il a été considéré qu'il n'y avait eu ni déplacement ni non-retour illicite.

La plupart des décisions révèlent toutefois que la question du consentement est généralement analysée dans le contexte de l'article 13(1) a), voir :

Australie
Director-General, Department of Child Safety v. Stratford [2005] Fam CA 1115 [Référence INCADAT : HC/E/UKe @830@] ;

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re C. (Abduction: Consent) [1996] 1 FLR 414 [Référence INCADAT : HC/E/UKe @53@] ;

T. v. T. (Abduction: Consent) [1999] 2 FLR 912 ;

Re D. (Abduction: Discretionary Return) [2000] 1 FLR 24 [Référence INCADAT : HC/E/UKe @267@] ;

Re P. (A Child) (Abduction: Acquiescence) [2004] EWCA CIV 971 [Référence INCADAT : HC/E/UKe @591@] ;

Irlande
B.B. v. J.B. [1998] 1 ILRM 136; sub nom B. v. B. (Child Abduction) [1998] 1 IR 299 [Référence INCADAT : HC/E/IE @287@] ;

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
T. v. T. 2004 S.C. 323 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 997].

Pour une analyse des problèmes cités ci-dessus, voir.: P. Beaumont et P. McEleavy, The Hague Convention on International Child Abduction, Oxford, OUP, 1999, p. 132 et seq.

Établissement du consentement

Des exigences différentes ont été appliquées en matière d'établissement d'une exception de l'article 13(1) a) pour consentement.

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Dans une décision de première instance ancienne, il fut considéré qu'il était nécessaire d'apporter une preuve claire et impérieuse et qu'en général cette preuve devait être écrite ou en tout cas soutenue par des éléments de preuve écrits. Voir :

Re W. (Abduction: Procedure) [1995] 1 FLR 878, [Référence INCADAT : HC/E/UKe @37@].

Cette approche restrictive n'a pas été maintenue dans des décisions de première instance plus récentes au Royaume-Uni. Voir :

Re C. (Abduction: Consent) [1996] 1 FLR 414 [Référence INCADAT : HC/E/UKe @53@];

Re K. (Abduction: Consent) [1997] 2 FLR 212 [Référence INCADAT : HC/E/UKe @55@].

Dans Re K. il fut décidé que si le consentement devait être réel, positif and non équivoque, il y avait des situations dans lesquelles le juge pouvait se satisfaire de preuves non écrites du consentement, et qu'il se pouvait même que le consentement fût déduit du comportement.

Allemagne
21 UF 70/01, Oberlandesgericht Köln, [Référence INCADAT : HC/E/DE @491@].

Il fut décidé qu'il était nécessaire d'apporter une preuve convaincante du consentement.

Irlande
R. v. R. [2006] IESC 7; [Référence INCADAT : HC/E/IE @817@].

La Cour suprême irlandaise repris expressément les termes de Re K.

Pays-Bas
De Directie Preventie, optredend voor haarzelf en namens F. (vader/father) en H. (de moeder/mother) (14 juli 2000, ELRO-nummer: AA6532, Zaaknr.R99/167HR); [Référence INCADAT : HC/E/NL @318@].

Le consentement peut ne pas porter sur un séjour permanent, pourvu que le consentement à un séjour au moins temporaire soit établi de manière convaincante.

Afrique du Sud
Central Authority v. H. 2008 (1) SA 49 (SCA) [Référence INCADAT : HC/E/ZA @900@].

Le consentement pouvait être exprès ou tacite.

Suisse
5P.367/2005 /ast, Bundesgericht, II. Zivilabteilung (Tribunal Fédéral, 2ème Chambre Civile), [Référence INCADAT : HC/E/CH @841@] ;

5P.380/2006 /blb, Bundesgericht, II. Zivilabteilung (Tribunal Fédéral, 2ème Chambre Civile),  [Référence INCADAT : HC/E/CH @895@];

5P.1999/2006 /blb, Bundesgericht, II. Zivilabteilung (Tribunal Fédéral, 2ème Chambre Civile), [Référence INCADAT : HC/E/CH @896@].

Le Tribunal fédéral suisse estima qu'il y avait consentement et acquiescement du parent victime si celui-ci avait accepté, expressément ou implicitement, un changement durable de la résidence de l'enfant. Il appartenait au parent ravisseur d'apporter des éléments de preuve factuels rendant plausible qu'il avait pu croire à ce consentement.

États-Unis d'Amérique
Baxter v. Baxter, 423 F.3d 363 (3rd Cir. 2005) [Référence INCADAT : HC/E/USf @808@].

Il convenait de rechercher ce que le parent victime avait en tête et également de prendre en compte la nature et l'étendue du consentement.