AFFAIRE

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Nom de l'affaire

Tribunal d'arrondissement de Luxembourg, 28 novembre 2012, Référé No 821/2012

Référence INCADAT

HC/E/LU 739

Juridiction

Pays

Luxembourg

Degré

Première instance

États concernés

État requérant

Royaume-Uni

État requis

Luxembourg

Décision

Date

28 November 2012

Statut

Confirmé par l'instance supérieure

Motifs

Résidence habituelle - art. 3 | Droit de garde - art. 3 | Risque grave - art. 13(1)(b)

Décision

Retour refusé

Article(s) de la Convention visé(s)

3 5 12 13(1)(b)

Article(s) de la Convention visé(s) par le dispositif

3 5 13(1)(b)

Autres dispositions
Article 3(1) de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989; Article 4 du Childrens Act du Royaume-Uni; Article 11 du Règlement Bruxelles II bis (Règlement (CE) No 2201/2003 du Conseil du 27 novembre 2003); Articles 1109 et 1110 du Nouveau Code de procédure civile de Luxembourg.
Jurisprudence | Affaires invoquées

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Publiée dans

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INCADAT commentaire

Objectifs et domaine d’application de la Convention

Résidence habituelle
Résidence habituelle

Mécanisme de retour

Droit de garde
La notion de droit de garde au sens de la Convention
Exercice effectif de la garde

Exceptions au retour

Sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales
Sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

RÉSUMÉ

Résumé disponible en FR

Faits

L'affaire concernait une enfant née en 2010 en Grande-Bretagne, de parents vivant en concubinage. Le 19 octobre 2010, la future mère de l'enfant, alors mineure, s'était vue placée dans un centre socio-éducatif Luxembourgeois jusqu'à ses 18 ans révolus par le Tribunal de la jeunesse près du tribunal d'arrondissement de et à Luxembourg.

La future mère, mineure, avait quitté le Luxembourg pour la Grande-Bretagne avant l'exécution de ce jugement, où elle avait ensuite vécu en concubinage avec son partenaire. La mineure donna naissance à l'enfant en Grande-Bretagne, où il fut reconnu par son père. En vertu de l'article 4 du Childrens Act de 1989, les parents exerçaient conjointement l'autorité parentale.

Au mois de décembre 2010, un « Child protection plan » fut mis en place pour l'enfant par les services sociaux britanniques.

En juin 2011, la mère atteignit la majorité. Elle quitta le domicile commun avec l'enfant suite à des violences domestiques et les parents se séparèrent. Le 27 juin 2011, la mère s'installa avec l'enfant dans un foyer en Grande-Bretagne.
En novembre 2011, la mère emmena l'enfant au Luxembourg et s'installa auprès de sa propre mère.

Le 9 décembre 2011, le juge de la jeunesse plaça la résidence de l'enfant auprès de sa grand-mère maternelle par mesure de garde provisoire.

Le père introduisit une demande en retour pour l'enfant sur la base des articles 3 et 12 de la Convention de La Haye de 1980 sur l'enlèvement d'enfants et de l'article 11 du Règlement Bruxelles II bis (Règlement (CE) No 2201/2003 du Conseil du 27 novembre 2003).

Dispositif

Déplacement illicite mais retour refusé ; un risque grave que le retour de l'enfant ne le place dans une situation intolérable était établi selon l'article 13(1)(b) de la Convention de La Haye.

Motifs

Résidence habituelle - art. 3


Relevant que l'enfant était née et avait grandi en Grande-Bretagne jusqu'au moment du déplacement au Luxembourg, le juge en conclut que l'enfant y avait sa résidence habituelle.

Droit de garde - art. 3


La grand-mère maternelle et la mère alléguaient que le père n'exerçait pas la garde effective de l'enfant lors de son déplacement.

Elles  soumettaient notamment que, après que la mère, victime de violences domestiques, s'était réfugiée au foyer, le père s'était vu refuser tout contact avec l'enfant suite à la mise en place de mesures de protection de l'enfant. Il n'avait donc pas, au moment du déplacement, la garde effective de l'enfant.

Le juge rappela que la notion de droit de garde telle qu'entendue par la Convention de La Haye, il « ressort[ait] des dispositions des articles 3 et 5 de la Convention, ainsi que des travaux préparatoires et du rapport explicatif, que les rédacteurs de la convention [avaient] entendu assimiler la garde à l'autorité parentale, et non à la résidence de l'enfant ou à une simple garde physique de l'enfant. Le gardien au sens de la Convention [était] donc celui qui exer[çait] l'autorité parentale, conjointement ou unilatéralement, peu important le lieu de résidence de l'enfant ».

Le juge nota qu'en l'espèce, il n'était pas contesté que l'enfant avait été reconnu par son père et qu'en vertu du Children Act de 1989 les parents exerçaient tous les deux conjointement l'autorité parentale. Il souligna que le fait de ne pas avoir la garde physique de l'enfant au moment où il avait été emmené ne permettait pas d'établir que le parent à qui l'enfant avait été retiré s'en désintéressait ou qu'il n'exerçait plus de façon effective sa responsabilité parentale.

Le juge nota qu'il ne pouvait pas être reproché au père d'avoir accepté de ne pas avoir de contact avec l'enfant en accord avec les mesures de protection de l'enfant prévues par les services sociaux britanniques (« Child protection plan » et « parenting/Risk assessment » ).

Le juge souligna, par ailleurs, que la mesure de garde provisoire prise par le Tribunal luxembourgeois ne justifiait pas le non-retour de l'enfant. Il en conclut que le déplacement constituait bien une atteinte au droit de garde du père, le déplacement était illicite au sens de l'article 3 de la Convention de La Haye et l'exception au retour du fait de l'absence d'exercice effectif de ce droit, prévue à l'article 13(1)(a) de la Convention de La Haye, n'était pas applicable.

Risque grave - art. 13(1)(b)


La grand-mère, et la mère alléguaient l'existence d'un risque grave en cas de retour de l'enfant.

Elles soumettaient que la mère avait été placée au centre socio-éducatif « au vu du danger encouru par la mineure » ; et que la mère comme l'enfant encouraient un danger du fait des actes de violence physique et psychique exercés par le père sur la mère. Elles ajoutaient que le père s'était vu refuser tout droit de visite sur l'enfant du fait de ces violences et mettaient en cause ses capacités éducatives.

Le père reprochait à la grand-mère maternelle d'avoir « monté un dossier contre lui » en son absence, et contestait l'existence d'un risque grave pour l'enfant en cas de retour. Le juge nota qu'il ne lui appartenait pas sur la base de la Convention de La Haye de se prononcer sur les capacités éducatives des parents.

Il rappela qu'en vertu de l'article 3(1) de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989, d'application directe, les circonstances décrites sous l'article 13(1)(b) de la Convention de La Haye devaient être appréciées en considération de l'intérêt supérieur de l'enfant.

Le juge fit référence à un arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme du 6 juillet 2010 (affaire Neulinger et Shuruk c. Suisse (Requête No 41615/07), Grande Chambre [Référence INCADAT: HC/E/ 1323]) posant que « dans la recherche du juste équilibre entre les intérêts concurrents en jeu (ceux de l'enfant, ceux des deux parents et ceux de l'ordre public) l'intérêt supérieur de l'enfant constitu[ait] la considération déterminante, la notion d'intérêt supérieur de l'enfant étant sous-jacente à la Convention de La Haye ».

Le juge nota que l'intérêt de l'enfant comportait deux aspects : le maintien des liens avec sa famille, et la garantie d'une évolution dans un environnement sain lui procurant la stabilité nécessaire à son bon développement, tout particulièrement pour un enfant en bas âge. Il releva à cet égard qu'en l'espèce, l'enfant n'avait pas d'attaches stables en Grande-Bretagne et n'y connaissait pas la stabilité nécessaire à son bon développement, « étant donné que sa situation changeait à plusieurs reprises et qu'elle vivait en dernier lieu avec sa mère dans un foyer.

La mère s'étant séparée du père et aucune décision de justice n'ayant été prise ni quant à la résidence de l'enfant, ni quant au droit de garde et/ou de visite, l'enfant risqu[ait] dès lors de se retrouver dans la même situation en cas de retour en Grande-Bretagne. A cela s'ajout[ait] que l'enfant […] était seulement âgée de sept mois lors de la séparation de ses parents et qu'elle n'a[vait] pas pu développer une relation stable vis-à-vis de son père, ce dernier ne l'ayant plus revue en attendant l'évaluation de ses capacités éducatives par les services sociaux britanniques et que l'enfant [était] actuellement bien intégrée dans sa famille maternelle ».

Le juge releva que, même si la Convention ne visait pas le fond du droit de garde mais le rétablissement du statu quo par le retour immédiat des enfants déplacés dans l'État où ils avaient leur résidence habituelle, il n'était pas établi que les juridictions britanniques étaient plus appropriées pour statuer quant au droit de garde et/ou de visite concernant l'enfant.

La mère avait été suivie par les services sociaux luxembourgeois et le juge de la jeunesse de Luxembourg, qui avait ordonné son placement avant même la naissance de l'enfant, dans son intérêt et celui de l'enfant à naitre, et qui avait ensuite ordonné le placement de l'enfant près de sa grand-mère maternelle où il évoluait depuis.

Le juge en conclut que le retour de l'enfant en Grande-Bretagne la placerait dans une situation intolérable comportant un risque grave pour sa santé psychique, l'exception pour risque grave de l'article 13(1)(b) était donc établie.

Commentaire INCADAT

Résidence habituelle

L'interprétation de la notion centrale de résidence habituelle (préambule, art. 3 et 4) s'est révélée particulièrement problématique ces dernières années, des divergences apparaissant dans divers États contractants. Une approche uniforme fait défaut quant à la question de savoir ce qui doit être au cœur de l'analyse : l'enfant seul, l'enfant ainsi que l'intention des personnes disposant de sa garde, ou simplement l'intention de ces personnes. En conséquence notamment de cette différence d'approche, la notion de résidence peut apparaître comme un élément de rattachement très flexible dans certains États contractants ou un facteur de rattachement plus rigide et représentatif d'une résidence à long terme dans d'autres.

L'analyse du concept de résidence habituelle est par ailleurs compliquée par le fait que les décisions concernent des situations factuelles très diverses. La question de la résidence habituelle peut se poser à l'occasion d'un déménagement permanent à l'étranger, d'un déménagement consistant en un test d'une durée illimitée ou potentiellement illimitée ou simplement d'un séjour à l'étranger de durée déterminée.

Tendances générales:

La jurisprudence des cours d'appel fédérales américaines illustre la grande variété d'interprétations données au concept de résidence habituelle.
Approche centrée sur l'enfant

La cour d'appel fédérale des États-Unis d'Amérique du 6e ressort s'est prononcée fermement en faveur d'une approche centrée sur l'enfant seul :

Friedrich v. Friedrich, 983 F.2d 1396, 125 ALR Fed. 703 (6th Cir. 1993) (6th Cir. 1993) [Référence INCADAT : HC/E/USf 142]

Robert v. Tesson, 507 F.3d 981 (6th Cir. 2007) [Référence INCADAT : HC/E/US 935]

Voir aussi :

Villalta v. Massie, No. 4:99cv312-RH (N.D. Fla. Oct. 27, 1999) [Référence INCADAT : HC/E/USf 221].

Approche combinée des liens de l'enfant et de l'intention parentale

Les cours d'appel fédérales des États-Unis d'Amérique des 3e et 8e ressorts ont privilégié une méthode où les liens de l'enfant avec le pays ont été lus à la lumière de l'intention parentale conjointe.
Le jugement de référence est le suivant : Feder v. Evans-Feder, 63 F.3d 217 (3d Cir. 1995) [Référence INCADAT : HC/E/USf 83].

Voir aussi :

Silverman v. Silverman, 338 F.3d 886 (8th Cir. 2003) [Référence INCADAT : HC/E/USf 530] ;

Karkkainen v. Kovalchuk, 445 F.3d 280 (3rd Cir. 2006) [Référence INCADAT : HC/E/USf 879].

Dans cette dernière espèce, une distinction a été pratiquée entre la situation d'enfants très jeunes (où une importance plus grande est attachée à l'intention des parents - voir par exemple : Baxter v. Baxter, 423 F.3d 363 (3rd Cir. 2005) [Référence INCADAT : HC/E/USf 808]) et celle d'enfants plus âgés pour lesquels l'intention parentale joue un rôle plus limité.

Approche centrée sur l'intention parentale

Aux États-Unis d'Amérique, la Cour d'appel fédérale du 9e ressort a rendu une décision dans l'affaire Mozes v. Mozes, 239 F.3d 1067 (9th Cir. 2001) [Référence INCADAT : HC/E/USf 301], qui s'est révélée très influente en exigeant la présence d'une intention ferme d'abandonner une résidence préexistante pour qu'un enfant puisse acquérir une nouvelle résidence habituelle.

Cette interprétation a été reprise et précisée par d'autres décisions rendues en appel par des juridictions fédérales de sorte qu'en l'absence d'intention commune des parents en cas de départ pour l'étranger, la résidence habituelle a été maintenue dans le pays d'origine, alors même que l'enfant a passé une période longue à l'étranger.  Voir par exemple :

Holder v. Holder, 392 F.3d 1009 (9th Cir 2004) [Référence INCADAT : HC/E/USf 777] : Résidence habituelle maintenue aux États-Unis d'Amérique malgré un séjour prévu de 4 ans en Allemagne ;

Ruiz v. Tenorio, 392 F.3d 1247 (11th Cir. 2004) [Référence INCADAT : HC/E/USf 780] : Résidence habituelle maintenue aux États-Unis d'Amérique malgré un séjour de 32 mois au Mexique ;

Tsarbopoulos v. Tsarbopoulos, 176 F. Supp.2d 1045 (E.D. Wash. 2001) [INCADAT : HC/E/USf 482] : Résidence habituelle maintenue aux États-Unis d'Amérique malgré un séjour de 27 mois en Grèce.

La décision rendue dans l'affaire Mozes a également été approuvée par les cours fédérales d'appel du 2e et du 7e ressort :

Gitter v. Gitter, 396 F.3d 124 (2nd Cir. 2005) [Référence INCADAT : HC/E/USf 776] ;

Koch v. Koch, 450 F.3d 703 (2006 7th Cir.) [Référence INCADAT : HC/E/USf 878] ;

Il convient de noter que dans l'affaire Mozes, la Cour a reconnu que si suffisamment de temps s'est écoulé et que l'enfant a vécu une expérience positive, la vie de l'enfant peut être si fermement attachée à son nouveau milieu qu'une nouvelle résidence habituelle doit pouvoir y être acquise nonobstant l'intention parentale contraire.

Autres États contractants

Dans d'autres États contractants, la position a évolué :

Autriche
La Cour suprême d'Autriche a décidé qu'une résidence de plus de six mois dans un État sera généralement caractérisée de résidence habituelle, quand bien même elle aurait lieu contre la volonté du gardien de l'enfant (puisqu'il s'agit d'une détermination factuelle du centre de vie).

8Ob121/03g, Oberster Gerichtshof [Référence INCADAT: HC/E/AT 548].

Canada
Au Québec, au contraire, l'approche est centrée sur l'enfant :
Dans Droit de la famille 3713, No 500-09-010031-003 [Référence INCADAT : HC/E/CA 651], la Cour d'appel de Montréal a décidé que la résidence habituelle d'un enfant est simplement une question de fait qui doit s'apprécier à la lumière de toutes les circonstances particulières de l'espèce en fonction de la réalité vécue par l'enfant en question, et non celle de ses parents. Le séjour doit être d'une durée non négligeable (nécessaire au développement de liens par l'enfant et à son intégration dans son nouveau milieu) et continue, aussi l'enfant doit-il avoir un lien réel et actif avec sa résidence; cependant, aucune durée minimale ne peut être formulée.

Allemagne
Une approche factuelle et centrée sur l'enfant ressort également de la jurisprudence allemande :

2 UF 115/02, Oberlandesgericht Karlsruhe [Référence INCADAT: HC/E/DE 944].

La Cour constitutionnelle fédérale a ainsi admis qu'une résidence habituelle puisse être acquise bien que l'enfant ait été illicitement déplacé dans le nouvel État de résidence :

Bundesverfassungsgericht, 2 BvR 1206/98, 29. Oktober 1998 [Référence INCADAT: HC/E/DE 233].

La Cour constitutionnelle a confirmé l'analyse de la Cour régionale d'appel selon laquelle les enfants avaient acquis leur résidence habituelle en France malgré la nature de leur déplacement là-bas. La Cour a en effet considéré  que la résidence habituelle était un concept factuel, et les enfants s'étaient intégrés dans leur milieu local pendant les neuf mois qu'ils y avaient vécu.

Israël
Des approches alternatives ont été adoptées lors de la détermination de la résidence habituelle. Il est arrivé qu'un poids important ait été accordé à l'intention parentale. Voir :

Family Appeal 1026/05 Ploni v. Almonit [Référence INCADAT: HC/E/Il 865] ;

Family Application 042721/06 G.K. v Y.K. [Référence INCADAT: HC/E/Il 939].

Cependant, il a parfois été fait référence à une approche plus centrée sur l'enfant. Voir :

décision de la Cour suprême dans C.A. 7206/03, Gabai v. Gabai, P.D. 51(2)241 ;

FamA 130/08 H v H [Référence INCADAT: HC/E/IL 922].

Nouvelle-Zélande
Contrairement à l'approche privilégiée dans l'affaire Mozes, la cour d'appel de la Nouvelle-Zélande a expressément rejeté l'idée que pour acquérir une nouvelle résidence habituelle, il convient d'avoir l'intention ferme de renoncer à la résidence habituelle précédente. Voir :

S.K. v. K.P. [2005] 3 NZLR 590 [Référence INCADAT: HC/E/NZ 816].

Suisse
Une approche factuelle et centrée sur l'enfant ressort de la jurisprudence suisse :

5P.367/2005/ast, Bundesgericht, II. Zivilabteilung (Tribunal Fédéral, 2ème Chambre Civile) [Référence INCADAT: HC/E/CH 841].

Royaume-Uni
L'approche standard est de considérer conjointement la ferme intention des personnes ayant la charge de l'enfant et la réalité vécue par l'enfant.

Re J. (A Minor) (Abduction: Custody Rights) [1990] 2 AC 562, [1990] 2 All ER 961, [1990] 2 FLR 450, sub nom C. v. S. (A Minor) (Abduction) [Référence INCADAT: HC/E/UKe 2].

Pour un commentaire doctrinal des différentes approches du concept de résidence habituelle dans les pays de common law. Voir :

R. Schuz, « Habitual Residence of  Children under the Hague Child Abduction Convention: Theory and Practice », Child and Family Law Quarterly, Vol. 13, No1, 2001, p.1 ;

R. Schuz, « Policy Considerations in Determining Habitual Residence of a Child and the Relevance of Context » Journal of Transnational Law and Policy, Vol. 11, 2001, p. 101.

La notion de droit de garde au sens de la Convention

Les tribunaux d'un nombre très majoritaire d'États considèrent que le droit pour un parent de s'opposer à ce que l'enfant quitte le pays est un droit de garde au sens de la Convention. Voir :

Australie
In the Marriage of Resina [1991] FamCA 33, [Référence INCADAT : HC/E/AU 257];

State Central Authority v. Ayob (1997) FLC 92-746, 21 Fam. LR 567 [Référence INCADAT : HC/E/AU 232] ;

Director-General Department of Families, Youth and Community Care and Hobbs, 24 September 1999, Family Court of Australia (Brisbane) [Référence INCADAT : HC/E/AU 294] ;

Autriche
2 Ob 596/91, 05 February 1992, Oberster Gerichtshof [Référence INCADAT : HC/E/AT 375] ;

Canada
Thomson v. Thomson [1994] 3 SCR 551, 6 RFL (4th) 290 [Référence INCADAT : HC/E/CA 11] ;

La Cour suprême distingua néanmoins selon que le droit de veto avait été donné dans une décision provisoire ou définitive, suggérant que considérer un droit de veto accordé dans une décision définitive comme un droit de garde aurait d'importantes conséquences sur la mobilité du parent ayant la garde physique de l'enfant.

Thorne v. Dryden-Hall, (1997) 28 RFL (4th) 297 [Référence INCADAT : HC/E/CA 12] ;

Decision of 15 December 1998, [1999] R.J.Q. 248 [Référence INCADAT : HC/E/CA 334] ;

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
C. v. C. (Minor: Abduction: Rights of Custody Abroad) [1989] 1 WLR 654, [1989] 2 All ER 465, [1989] 1 FLR 403, [1989] Fam Law 228 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 34] ;

Re D. (A child) (Abduction: Foreign custody rights) [2006] UKHL 51, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 880] ;

France
Ministère Public c. M.B. 79 Rev. crit. 1990, 529, note Y. Lequette [Référence INCADAT : HC/E/FR 62] ;

Allemagne
2 BvR 1126/97, Bundesverfassungsgericht, (Federal Constitutional Court), [Référence INCADAT : HC/E/DE 338] ;

10 UF 753/01, Oberlandesgericht Dresden, [Référence INCADAT : HC/E/DE 486] ;

Royaume-Uni - Écosse
Bordera v. Bordera 1995 SLT 1176 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 183];

A.J. v. F.J. [2005] CSIH 36, 2005 1 SC 428 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 803].

Afrique du Sud
Sonderup v. Tondelli 2001 (1) SA 1171 (CC), [Référence INCADAT : HC/E/ZA 309].

Suisse
5P.1/1999, Tribunal fédéral suisse, (Swiss Supreme Court), 29 March 1999, [Référence INCADAT : HC/E/CH 427].

États-Unis d'Amérique
Les cours d'appel fédérales des États-Unis étaient divisées entre 2000 et 2010 quant à l'interprétation à donner à la notion de garde.

Elles ont suivi majoritairement la position de la Cour d'appel du second ressort, laquelle a adopté une interprétation stricte. Voir :

Croll v. Croll, 229 F.3d 133 (2d Cir., 2000; cert. den. Oct. 9, 2001) [Référence INCADAT : HC/E/USf 313] ;

Gonzalez v. Gutierrez, 311 F.3d 942 (9th Cir 2002) [Référence INCADAT : HC/E/USf 493] ;

Fawcett v. McRoberts, 326 F.3d 491, 500 (4th Cir. 2003), cert. denied 157 L. Ed. 2d 732, 124 S. Ct. 805 (2003) [Référence INCADAT : HC/E/USf 494] ;

Abbott v. Abbott, 542 F.3d 1081 (5th Cir. 2008), [Référence INCADAT : HC/E/USf 989].

La Cour d'appel du 11ème ressort a néanmoins adopté l'approche majoritairement suivie à l'étranger.

Furnes v. Reeves 362 F.3d 702 (11th Cir. 2004) [Référence INCADAT : HC/E/USf 578].

La question a été tranchée, du moins lorsqu'il s'agit d'un parent demandeur qui a le droit de décider du lieu de résidence habituelle de son enfant ou bien lorsqu'un tribunal de l'État de résidence habituelle de l'enfant cherche à protéger sa propre compétence dans l'attente d'autres jugements, par la Court suprême des États-Unis d'Amérique qui a adopté l'approche suivie à l'étranger.

Abbott v. Abbott (US SC 2010), [Référence INCADAT : HC/E/USf 1029]

La Cour européenne des droits de l'homme a adopté l'approche majoritairement suivie à l'étranger, voir:
 
Neulinger & Shuruk v. Switzerland, No. 41615/07, 8 January 2009 [Référence INCADAT :HC/E/ 1001].

Décision confirmée par la Grande Chambre: Neulinger & Shuruk v. Switzerland, No 41615/07, 6 July 2010 [Référence INCADAT :HC/E/ 1323].

Droit de s'opposer à un déplacement

Quand un individu n'a pas de droit de veto sur le déplacement d'un enfant hors de son État de residence habituelle mais peut seulement s'y opposer et demander à un tribunal d'empêcher un tel déplacement, il a été considéré dans plusieurs juridictions que cela n'était pas suffisant pour constituer un droit de garde au sens de la Convention:

Canada
W.(V.) v. S.(D.), 134 DLR 4th 481 (1996), [Référence INCADAT :HC/E/CA 17];

Ireland
W.P.P. v. S.R.W. [2001] ILRM 371, [Référence INCADAT :HC/E/IE 271];

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re V.-B. (Abduction: Custody Rights) [1999] 2 FLR 192, [Référence INCADAT :HC/E/UKe 261];

S. v. H. (Abduction: Access Rights) [1998] Fam 49 [Référence INCADAT :HC/E/UKe 36];

Royaume-Uni - Écosse
Pirrie v. Sawacki 1997 SLT 1160, [Référence INCADAT :HC/E/UKs 188].

Cette interprétation a également été retenue par la Cour de justice de l'Union européenne:

Case C-400/10 PPU J. McB. v. L.E., [Référence INCADAT :HC/E/ 1104].

La Cour de justice a jugé qu'une décision contraire serait incompatible avec les exigences de sécurité juridique et la nécessité de protéger les droits et libertés des autres personnes impliquées, notamment ceux du détenteur de la garde exclusive de l'enfant.

Voir les articles suivants :

P. Beaumont et P.McEleavy, The Hague Convention on International Child Abduction, Oxford, OUP, 1999, p. 75 et seq. ;

M. Bailey, « The Right of a Non-Custodial Parent to an Order for Return of a Child Under the Hague Convention », Canadian Journal of Family Law, 1996, p. 287 ;

C. Whitman, « Croll v. Croll: The Second Circuit Limits ‘Custody Rights' Under the Hague Convention on the Civil Aspects of International Child Abduction », Tulane Journal of International and Comparative Law, 2001 , p. 605.

Exercice effectif de la garde

Les juridictions d'une quantité d'États parties ont également privilégié une interprétation large de la notion d'exercice effectif de la garde. Voir :

Australie
Director General, Department of Community Services Central Authority v. J.C. and J.C. and T.C. (1996) FLC 92-717 [Référence INCADAT : HC/E/AU 68] ;

Autriche
8Ob121/03g, Oberster Gerichtshof, 30/10/2003 [Référence INCADAT: HC/E/AT 548] ;

Belgique
N° de rôle: 02/7742/A, Tribunal de première instance de Bruxelles 6/3/2003 [Référence INCADAT: HC/E/BE 545] ;

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re W. (Abduction: Procedure) [1995] 1 FLR 878, [1996] 1 FCR 46, [1995] Fam Law 351 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 37] ;

France
Ministère Public c. M.B. Cour d'Appel d'Aix en Provence (6e Ch.) 23 Mars 1989, 79 Rev. crit. 1990, 529 note Y. Lequette [Référence INCADAT : HC/E/FR 62] ;

CA Amiens 4 mars 1998, n° 5704759 [Référence INCADAT : HC/E/FR 704] ;

CA Aix en Provence 8/10/2002, L. v. Ministère Public, Mme B et Mesdemoiselles L (N° de rôle 02/14917) [Référence INCADAT : HC/E/FR 509] ;

Allemagne
11 UF 121/03, Oberlandesgericht Hamm, [Référence INCADAT : HC/E/DE 822] ;

21 UF 70/01, Oberlandesgericht Köln, [Référence INCADAT : HC/E/DE 491] ;

Nouvelle-Zélande
The Chief Executive of the Department for Courts for R. v. P., 20 September 1999, Court of Appeal of New Zealand [Référence INCADAT : HC/E/NZ 304] ;

Royaume-Uni - Écosse
O. v. O. 2002 SC 430 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 507].

Dans cette décision, la « Court of Session », Cour suprême écossaise, estima que ce serait peut-être aller trop loin que de suggérer, comme les juges américains dans l'affaire Friedrich v. Friedrich, que seuls des actes d'abandon clairs et dénués d'ambiguïté pouvaient être interprétés comme impliquant que le droit de garde n'était pas exercé effectivement. Toutefois, « Friedrich » fut approuvée dans une affaire écossaise subséquente:

S. v. S., 2003 SLT 344 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 577].

Cette interprétation fut confirmée par la cour d'appel d'Écosse :

A.J. v. F.J. 2005 CSIH 36 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 803].

Suisse
K. v. K., 13 février 1992, Tribunal cantonal de Horgen [Référence INCADAT : HC/E/SZ 299] ;

449/III/97/bufr/mour, Cour d'appel du canton de Berne, [Référence INCADAT : HC/E/CH 433];

5A_479/2007/frs, Tribunal fédéral, IIè cour civile, [Référence INCADAT : HC/E/CH 953];

États-Unis d'Amérique
Friedrich v. Friedrich 78 F.3d 1060 (6th Cir) [Référence INCADAT : HC/E/USf 82] ;

Sealed Appellant v. Sealed Appellee, 15 December 2004, United States Court of Appeals for the Fifth Circuit [Référence INCADAT : HC/E/US 779] ;

Abbott v. Abbott, 130 S. Ct. 1983 (2010), [Référence INCADAT : HC/E/USf 1029].

Sur cette question, voir : P. Beaumont et P. McEleavy, The Hague Convention on International Child Abduction, OUP, Oxford, 1999 p. 84 et seq.

Sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

Résumé INCADAT en cours de préparation.