AFFAIRE

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Nom de l'affaire

Bordera v. Bordera 1995 SLT 1176

Référence INCADAT

HC/E/UKs 183

Juridiction

Pays

Royaume-Uni - Écosse

Nom

Outer House of the Court of Session (Ecosse)

Degré

Première instance

États concernés

État requérant

Espagne

État requis

Royaume-Uni - Écosse

Décision

Date

18 August 1994

Statut

Définitif

Motifs

Droit de garde - art. 3

Décision

Retour ordonné

Article(s) de la Convention visé(s)

3 5 12 14 15 21

Article(s) de la Convention visé(s) par le dispositif

3

Autres dispositions

-

Jurisprudence | Affaires invoquées

-

INCADAT commentaire

Mécanisme de retour

Droit de garde
La notion de droit de garde au sens de la Convention
Patria Potestas

RÉSUMÉ

Résumé disponible en EN | FR | ES

Faits

L'enfant, un garçon, était âgé de 8 ans ¼ à la date du déplacement dont le caractère illicite était allégué. Il avait vécu toute sa vie en Espagne. Les parents étaient séparés. Selon un accord obligatoire, la mère disposait de la garde, le père ayant un droit de visite. Le 6 décembre 1993, la mère emmena l'enfant en Ecosse sans obtenir le consentement du père.

Le 27 janvier 1994, l'Autorité Centrale espagnole demanda le retour de l'enfant.

Dispositif

Retour ordonné ; le déplacement méconnaissait le droit de garde du père.

Motifs

Droit de garde - art. 3

Les droits d’un parent au regard de l’enfant doivent être examinés dans leur globalité pour pouvoir déterminer s’ils peuvent être qualifiés de droit de garde. Dans leur accord en date du 28 février 1992, les parents avaient stipulé qu’ils exerceraient conjointement la garde, conformément au code civil espagnol. L’accord prévoyait que la mère avait la garde physique de l’enfant, sans préjudice de la patria potestas qui était partagée par les parents. Cela signifie que le père n’avait pas seulement un droit de visite et de supervision générale, mais partageait également avec la mère la responsabilité de la détermination du lieu de résidence de l’enfant. Par conséquent, le déplacement unilatéral du fait de la mère, intervenant en violation de ces droits, était entaché d’illicéité.

Commentaire INCADAT

La notion de droit de garde au sens de la Convention

Les tribunaux d'un nombre très majoritaire d'États considèrent que le droit pour un parent de s'opposer à ce que l'enfant quitte le pays est un droit de garde au sens de la Convention. Voir :

Australie
In the Marriage of Resina [1991] FamCA 33, [Référence INCADAT : HC/E/AU 257];

State Central Authority v. Ayob (1997) FLC 92-746, 21 Fam. LR 567 [Référence INCADAT : HC/E/AU 232] ;

Director-General Department of Families, Youth and Community Care and Hobbs, 24 September 1999, Family Court of Australia (Brisbane) [Référence INCADAT : HC/E/AU 294] ;

Autriche
2 Ob 596/91, 05 February 1992, Oberster Gerichtshof [Référence INCADAT : HC/E/AT 375] ;

Canada
Thomson v. Thomson [1994] 3 SCR 551, 6 RFL (4th) 290 [Référence INCADAT : HC/E/CA 11] ;

La Cour suprême distingua néanmoins selon que le droit de veto avait été donné dans une décision provisoire ou définitive, suggérant que considérer un droit de veto accordé dans une décision définitive comme un droit de garde aurait d'importantes conséquences sur la mobilité du parent ayant la garde physique de l'enfant.

Thorne v. Dryden-Hall, (1997) 28 RFL (4th) 297 [Référence INCADAT : HC/E/CA 12] ;

Decision of 15 December 1998, [1999] R.J.Q. 248 [Référence INCADAT : HC/E/CA 334] ;

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
C. v. C. (Minor: Abduction: Rights of Custody Abroad) [1989] 1 WLR 654, [1989] 2 All ER 465, [1989] 1 FLR 403, [1989] Fam Law 228 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 34] ;

Re D. (A child) (Abduction: Foreign custody rights) [2006] UKHL 51, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 880] ;

France
Ministère Public c. M.B. 79 Rev. crit. 1990, 529, note Y. Lequette [Référence INCADAT : HC/E/FR 62] ;

Allemagne
2 BvR 1126/97, Bundesverfassungsgericht, (Federal Constitutional Court), [Référence INCADAT : HC/E/DE 338] ;

10 UF 753/01, Oberlandesgericht Dresden, [Référence INCADAT : HC/E/DE 486] ;

Royaume-Uni - Écosse
Bordera v. Bordera 1995 SLT 1176 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 183];

A.J. v. F.J. [2005] CSIH 36, 2005 1 SC 428 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 803].

Afrique du Sud
Sonderup v. Tondelli 2001 (1) SA 1171 (CC), [Référence INCADAT : HC/E/ZA 309].

Suisse
5P.1/1999, Tribunal fédéral suisse, (Swiss Supreme Court), 29 March 1999, [Référence INCADAT : HC/E/CH 427].

États-Unis d'Amérique
Les cours d'appel fédérales des États-Unis étaient divisées entre 2000 et 2010 quant à l'interprétation à donner à la notion de garde.

Elles ont suivi majoritairement la position de la Cour d'appel du second ressort, laquelle a adopté une interprétation stricte. Voir :

Croll v. Croll, 229 F.3d 133 (2d Cir., 2000; cert. den. Oct. 9, 2001) [Référence INCADAT : HC/E/USf 313] ;

Gonzalez v. Gutierrez, 311 F.3d 942 (9th Cir 2002) [Référence INCADAT : HC/E/USf 493] ;

Fawcett v. McRoberts, 326 F.3d 491, 500 (4th Cir. 2003), cert. denied 157 L. Ed. 2d 732, 124 S. Ct. 805 (2003) [Référence INCADAT : HC/E/USf 494] ;

Abbott v. Abbott, 542 F.3d 1081 (5th Cir. 2008), [Référence INCADAT : HC/E/USf 989].

La Cour d'appel du 11ème ressort a néanmoins adopté l'approche majoritairement suivie à l'étranger.

Furnes v. Reeves 362 F.3d 702 (11th Cir. 2004) [Référence INCADAT : HC/E/USf 578].

La question a été tranchée, du moins lorsqu'il s'agit d'un parent demandeur qui a le droit de décider du lieu de résidence habituelle de son enfant ou bien lorsqu'un tribunal de l'État de résidence habituelle de l'enfant cherche à protéger sa propre compétence dans l'attente d'autres jugements, par la Court suprême des États-Unis d'Amérique qui a adopté l'approche suivie à l'étranger.

Abbott v. Abbott (US SC 2010), [Référence INCADAT : HC/E/USf 1029]

La Cour européenne des droits de l'homme a adopté l'approche majoritairement suivie à l'étranger, voir:
 
Neulinger & Shuruk v. Switzerland, No. 41615/07, 8 January 2009 [Référence INCADAT :HC/E/ 1001].

Décision confirmée par la Grande Chambre: Neulinger & Shuruk v. Switzerland, No 41615/07, 6 July 2010 [Référence INCADAT :HC/E/ 1323].

Droit de s'opposer à un déplacement

Quand un individu n'a pas de droit de veto sur le déplacement d'un enfant hors de son État de residence habituelle mais peut seulement s'y opposer et demander à un tribunal d'empêcher un tel déplacement, il a été considéré dans plusieurs juridictions que cela n'était pas suffisant pour constituer un droit de garde au sens de la Convention:

Canada
W.(V.) v. S.(D.), 134 DLR 4th 481 (1996), [Référence INCADAT :HC/E/CA 17];

Ireland
W.P.P. v. S.R.W. [2001] ILRM 371, [Référence INCADAT :HC/E/IE 271];

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re V.-B. (Abduction: Custody Rights) [1999] 2 FLR 192, [Référence INCADAT :HC/E/UKe 261];

S. v. H. (Abduction: Access Rights) [1998] Fam 49 [Référence INCADAT :HC/E/UKe 36];

Royaume-Uni - Écosse
Pirrie v. Sawacki 1997 SLT 1160, [Référence INCADAT :HC/E/UKs 188].

Cette interprétation a également été retenue par la Cour de justice de l'Union européenne:

Case C-400/10 PPU J. McB. v. L.E., [Référence INCADAT :HC/E/ 1104].

La Cour de justice a jugé qu'une décision contraire serait incompatible avec les exigences de sécurité juridique et la nécessité de protéger les droits et libertés des autres personnes impliquées, notamment ceux du détenteur de la garde exclusive de l'enfant.

Voir les articles suivants :

P. Beaumont et P.McEleavy, The Hague Convention on International Child Abduction, Oxford, OUP, 1999, p. 75 et seq. ;

M. Bailey, « The Right of a Non-Custodial Parent to an Order for Return of a Child Under the Hague Convention », Canadian Journal of Family Law, 1996, p. 287 ;

C. Whitman, « Croll v. Croll: The Second Circuit Limits ‘Custody Rights' Under the Hague Convention on the Civil Aspects of International Child Abduction », Tulane Journal of International and Comparative Law, 2001 , p. 605.

Patria Potestas

La notion de patria potestas, qui continue de jouer un rôle résiduel dans les États de langue espagnole a été interprétée par les juridictions de plusieurs États contractants comme un droit de garde au sens de la Convention. Voir :

Islande
M. v. K., 20/06/2000; Cour suprême d'Islande [Référence INCADAT : HC/E/IS 363].

La violation du droit de patria potestas du père a été considérée comme rendant le déplacement illicite au sens de la Convention.

Royaume-Uni - Écosse
La Court of Session, cour suprême écossaise, a également considéré qu'un déplacement intervenu en violation de la patria potestas du père constituait un déplacement illicite, voir : Bordera v. Bordera 1995 SLT 117, [Référence INCADAT : HC/E/UKs 183].

États-Unis d'Amérique
Dans la décision américaine Whallon v. Lynn, 230 F.3d 450 (1st Cir. October 27, 2000), [Référence INCADAT : HC/E/USf 388] le concept de patria potestas du droit mexicain a reçu une interprétation similaire.

Les décisions américaines Gil v. Rodriguez, 184 F.Supp.2d 1221 (M.D.Fla.2002), [Référence INCADAT : HC/E/USf 462], et

Vale v. Avila, 538 F.3d 581, (7th Cir. 2008), [Référence INCADAT : HC/E/USf 990] ont également donné la même interprétation au concept de patria potestas du droit vénézuélien.

Toutefois, dans l'affaire Gonzalez v. Gutierrez, 311 F.3d 942 (9th Cir 2002) [référence INCADAT : HC/E/USf 493], la cour d'appel fédérale américaine du 9e ressort a décidé que le père demandeur ne pouvait prétendre avoir un droit de garde sur le fondement du concept mexicain de patria potestas dans la mesure où la mère et lui avaient exécuté un accord formel de garde.