AFFAIRE

Texte complet non disponible

Nom de l'affaire

Droit de la famille 2675, No 200-04-003138-979

Référence INCADAT

HC/E/CA 666

Juridiction

Pays

Canada

Nom

Cour supérieure de Québec

Degré

Première instance

États concernés

État requérant

France

État requis

Canada

Décision

Date

22 April 1997

Statut

Confirmé par l'instance supérieure

Motifs

Déplacement et non-retour - art. 3 et 12 | Droit de garde - art. 3 | Risque grave - art. 13(1)(b) | Questions procédurales

Décision

Retour ordonné

Article(s) de la Convention visé(s)

3 13(1)(b) 26

Article(s) de la Convention visé(s) par le dispositif

3 13(1)(b) 26

Autres dispositions

-

Jurisprudence | Affaires invoquées

-

INCADAT commentaire

Exceptions au retour

Risque grave de danger
Allégations de mauvais traitement et abus sexuel

Mise en œuvre & difficultés d’application

Questions procédurales
Frais

RÉSUMÉ

Résumé disponible en FR

Faits

La demande concernait un enfant né en France en avril 1996. Les parents, qui n'étaient pas mariés, résidaient dans ce pays. Le 12 janvier 1997, la mère emmena unilatéralement l'enfant au Québec. Le père demanda le retour de l'enfant en France.

Dispositif

Retour ordonné; le déplacement était illicite et la mère n'avait pas rapporté la preuve que l'exception de risque grave était applicable.

Motifs

Déplacement et non-retour - art. 3 et 12


La Cour rappela que selon la Cour suprême l'intérêt d'un enfant est généralement mieux servi par un retour immédiat au lieu d'origine.

Droit de garde - art. 3


La Cour observa que le déplacement est illicite s'il est intervenu en violation d'un droit de garde attribué dans l'Etat de la résidence habituelle. Certes cette dernière notion ne fait pas l'objet d'une définition légale mais la jurisprudence admet généralement qu'il s'agit d'une question de fait qui s'attache à la réalité vécue par l'enfant et non l'intention des parents.

La cour nota qu'en droit français, les parents ont l'autorité parentale de plein droit. En ôtant l'enfant à la garde de son père sans son consentement, la mère avait donc déplacé illicitement l'enfant.

Risque grave - art. 13(1)(b)


La mère faisait état de divers épisodes de violence du père à son égard au point qu'il ne lui avait laissé aucun choix que de quitter la France. Le père admettait que le couple connaissait des difficultés mais niait toute violence ou menace à l'égard de la mère.

La Cour estima que la mère, sur laquelle reposait le fardeau de la preuve, n'avait pas démontré que le retour en France de l'enfant l'exposerait à un risque grave. Les versions des parents étaient contradictoires ; la mère elle-même avait contredit à l'audience sa propre version écrite des faits et elle avait exagéré les problèmes; elle n'apportait en outre aucune corroboration.

La mère allégeait également que le père avait une méthode d'éducation très stricte et qu'il avait secoué l'enfant à plusieurs reprises. Le père niait cette version, ajoutant qu'il s'occupait de l'enfant hors de ses heures de travail et jouait beaucoup avec lui, ce qui était confirmé par plusieurs témoins.

La Cour décida que si la mère avait eu des craintes sérieuses à propos de son fils, elle ne l'aurait pas laissé aux soins du père, en congés, après ce qu'elle présentait comme un incident sérieux. La Cour nota enfin que la mère avait déclaré qu'elle rentrerait en France avec l'enfant si le retour devait être ordonné.

Questions procédurales

La mère fut condamnée à payer 4500 dollars au père sur le fondement de l'article 39 de la loi mettant en oeuvre la Convention.

Commentaire INCADAT

Allégations de mauvais traitement et abus sexuel

Les tribunaux ont adopté des positions variables lorsqu'ils ont été confrontés à des allégations selon lesquelles le parent délaissé avait fait subir des mauvais traitements ou abus sexuels à l'enfant déplacé ou retenu illicitement. Dans les affaires les plus simples, les accusations ont pu être rejetées comme non fondées. Lorsqu'il n'était pas évident que l'allégation était manifestement non fondée, les tribunaux se sont montrés divisés quant à savoir si une enquête poussée devait être menée dans l'État de refuge ou bien dans l'État de la résidence habituelle, auquel cas des mesures de protection provisoires seraient prises en vue de protéger l'enfant en cas de retour.

- Accusations déclarées non fondées :

Belgique

Civ Liège (réf) 14 mars 2002, Ministère public c/ A [Référence INCADAT : HC/E/BE 706]

Le père prétendait que la mère ne voulait le retour de l'enfant que pour la faire déclarer folle et vendre ses organes. Toutefois, le juge releva que si les déclarations du père relevaient d'une profonde conviction, elles n'étaient pas étayées d'éléments de preuve.

Canada (Québec)
Droit de la famille 2675, No 200-04-003138-979 [Référence INCADAT : HC/E/CA 666]

La Cour décida que si la mère avait eu des craintes sérieuses à propos de son fils, elle ne l'aurait pas laissé aux soins du père pendant les vacances, après ce qu'elle présentait comme un incident sérieux.

J.M. c. H.A., Droit de la famille, N°500-04-046027-075 [Référence INCADAT : HC/E/CA 968]

La mère faisait valoir un risque grave au motif que le père était un prédateur sexuel. La Cour rappela que toutes les procédures étrangères avaient rejeté ces allégations, et indiqua qu'il fallait garder en mémoire que la question posée était celle du retour et non de la garde. Elle constata que les craintes de la mère et de ses parents étaient largement irraisonnées, et que la preuve de la corruption des autorités judiciaires de l'État de résidence habituelle n'était pas davantage rapportée. La Cour exprima au contraire une crainte face à la réaction de la famille de la mère (rappelant qu'ils avaient enlevé l'enfant en dépit de 3 interdictions judiciaires de ce faire), ainsi qu'une critique concernant les capacités mentales de la mère, qui avait maintenu l'enfant dans un climat de peur de son père.

France
CA Amiens 4 mars 1998, n° RG 5704759 [Référence INCADAT : HC/E/FR 704]

La Cour rejeta l'allégation de violence physique du père à l'égard de l'enfant. S'il pouvait y avoir eu des épisodes violents, ils n'étaient pas de nature à caractériser le risque nécessaire à l'application de l'article 13(1)(b).

Nouvelle Zélande
Wolfe v. Wolfe [1993] NZFLR 277 [Référence INCADAT : HC/E/NZ 303]

La Cour rejeta l'allégation selon laquelle les habitudes sexuelles du père étaient de nature à causer un risque grave de danger pour l'enfant. Elle ajouta que la preuve n'avait pas été apportée que le retour exposerait l'enfant à un risque tel que l'article 13(1)(b) serait applicable.

Suisse
Obergericht des Kantons Zürich (Cour d'appel du canton de Zurich) (Suisse), 28/01/1997, U/NL960145/II.ZK [Référence INCADAT : HC/E/CH 426]

La mère prétendait que le père constituait un danger pour les enfants parce qu'il avait entre autres abusé sexuellement de l'enfant. Pour rejeter cet argument, la Cour fit observer que la mère avait jusqu'alors laissé l'enfant vivre seul avec son père pendant qu'elle voyageait à l'étranger.

Retour ordonné et enquête à mener dans l'État de la résidence habituelle de l'enfant :

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
N. v. N. (Abduction: Article 13 Defence) [1995] 1 FLR 107 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 19]

Le risque encouru par l'enfant devait faire l'objet d'une enquête dans le cadre de la procédure de garde en cours en Australie.  Il convenait de protéger l'enfant jusqu'à la conclusion de cette enquête. Toutefois cette nécessité de protection ne devait pas mener au rejet de la demande de retour car le risque était lié non pas au retour en Australie mais à un droit de visite et d'hébergement non surveillé.

Re S. (Abduction: Return into Care) [1999] 1 FLR 843 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 361]

La Cour rejeta les allégations selon lesquelles l'enfant était victime d'abus sexuels de la part du concubin de la mère de nature à déclencher le jeu de l'exception prévue à l'article 13(1)(b). Pour rejeter l'application de l'article 13(1)(b), la Cour avait relevé que les autorités suédoises étaient conscientes de ce risque d'abus et avaient pris des mesures précises de nature à protéger l'enfant à son retour : elle serait placée dans un foyer d'analyse avec sa mère. Si la mère refusait, alors l'enfant serait ôtée à sa famille et placée dans un foyer. Elle fit également remarquer que la mère s'était séparée de son concubin.

Finlande
Supreme Court of Finland 1996:151, S96/2489 [Référence INCADAT : HC/E/FI 360]

Lors de son analyse concernant la question de savoir si l'allégation selon laquelle le père aurait abusé sexuellement de sa fille constituait une barrière au retour de l'enfant, la Cour a fait observer, d'une part, qu'un des objectifs de la Convention de La Haye était d'empêcher que le for devant se prononcer sur le retour de l'enfant soit choisi arbitrairement. La Cour observa, d'autre part, que la crédibilité des allégations devrait être analysée dans l'État de la résidence habituelle des époux car il s'agissait de l'État le mieux placé, et qu'aucun risque grave de danger n'existait si la mère accompagnait les enfants et organisait des conditions de vie dans leur meilleur intérêt. Dans ces conditions le retour pouvait être ordonné.

Irlande
A.S. v. P.S. (Child Abduction) [1998] 2 IR 244 [Référence INCADAT : HC/E/IE 389]

La Cour suprême irlandaise a noté qu'à première vue la preuve avait été apportée que les enfants avaient été victimes d'abus sexuels de la part du père et ne devaient pas être placés sous sa garde. Cependant, le tribunal avait estimé à tort que le retour des enfants en lui-même constituerait un risque grave. Au vu des engagements pris par le père, il n'y aurait pas de risque grave à renvoyer les enfants dans leur foyer familial sous la seule garde de la mère.

- Enquête à mener dans l'État de refuge :

Chine (Région administrative spéciale de Hong Kong)
D. v. G. [2001] 1179 HKCU 1 [Référence INCADAT : HC/E/HK 595]

La Cour d'appel critiqua le fait que le retour était soumis à une condition sur laquelle les juridictions de la Chine (RAS Hong Kong) n'avaient aucun contrôle (ni aucune compétence). La condition posée étant l'action d'un tiers (l'Autorité centrale suisse). La Cour estima que jusqu'à ce que les allégations se révèlent dénuées de fondement, il n'était pas admissible que la cour, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, décide de renvoyer l'enfant dans le milieu dans lequel les abus s'étaient produits.

États-Unis d'Amérique
Danaipour v. McLarey, 286 F.3d 1 (1st Cir.2002) [Référence INCADAT : HC/E/USf 459]

La Cour d'appel du premier ressort estima que le premier juge aurait dû faire preuve d'une grande prudence avant de renvoyer un enfant alors même qu'il y avait de sérieuses raisons de croire qu'il avait fait l'objet d'abus sexuels. La Cour d'appel ajouta que les juges devaient se montrer particulièrement prudents dans leur tentative de garantir la protection de l'enfant par la voie d'engagements dans des situations analogues.

Kufner v. Kufner, 519 F.3d 33 (1st Cir. 2008), [Référence INCADAT : HC/E/USf 971]

Le Tribunal fédéral avait demandé à un pédiatre spécialisé dans les questions de maltraitance, d'abus sexuels sur enfants et de pédopornographie de se prononcer sur la question de savoir si les photos des enfants constituaient des photos pornographiques et si les troubles comportementaux des enfants traduisaient un abus sexuel. L'expert conclut qu'aucun élément ne permettait de déduire que le père était pédophile, qu'il était attiré sexuellement par des enfants ni que les photos étaient pornographiques. Elle approuva l'enquête allemande et constata que les conclusions allemandes étaient conformes aux observations effectuées. Elle ajouta que les symptômes développés par les enfants étaient causés par le stress que la séparation très difficile des parents leur causait. Elle ajouta encore que les enfants ne devaient pas être soumis à d'autres évaluations en vue d'établir un abus sexuel car cela ne ferait qu'ajouter à leur niveau de stress déjà dangereusement élevé.

- Retour refusé :

Royaume-Uni - Écosse
Q., Petitioner, [2001] SLT 243, [Référence INCADAT : HC/E/UKs 341]

Le juge estima qu'il était possible que les allégations d'abus fussent exactes. De même, il n'était pas impossible qu'en cas de retour, l'enfant puisse être amené à avoir un contact non surveillé avec l'auteur potentiel de ces abus. Elle observa toutefois que les autorités d'autres États parties à la Convention de La Haye sont susceptibles de fournir une protection adéquate à l'enfant. En conséquence, le retour d'un enfant pouvait être ordonné même en cas d'allégations d'abus sexuels. En l'espèce cependant, le juge estima qu'au regard des différentes procédures ouvertes en France, il semblait que les juridictions compétentes n'étaient pas en mesure de protéger l'enfant, ou pas disposées à le faire. Elle en a déduit que le retour de l'enfant l'exposerait à un risque grave de danger physique ou psychologique ou la placerait de toute autre manière dans une situation intolérable.

États-Unis d'Amérique
Danaipour v. McLarey, 386 F.3d 289 (1st Cir. 2004), [Référence INCADAT : HC/E/USf 597]

Ces conclusions rendaient inopérants les arguments du père selon lequel les autorités suédoises pourraient prendre des mesures pour limiter tout danger supplémentaire une fois les enfants rentrées dans ce pays. La Cour d'appel décida qu'en ces circonstances, l'application de l'article 13(1)(b) n'exigeait pas que la question des engagements du père soit posée, pas davantage que celle des mesures à prendre par les juridictions de l'État de résidence habituelle.

(Auteur : Peter McEleavy, Avril 2013)

Frais

Résumé INCADAT en cours de préparation.