HC/E/UKe 43
Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
High Court (Angleterre)
Première instance
Australie
Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
8 March 1990
Définitif
Résidence habituelle - art. 3 | Risque grave - art. 13(1)(b) | Questions procédurales
Retour ordonné
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Le tribunal a estimé que la résidence était établie de manière suffisamment continue par les parents avec l'enfant pour qu'il puisse être admis qu'ils avaient leur résidence habituelle en Australie avant le déplacement.
Le concept de risque grave ne peut être assimilé à la considération de l'intérêt supérieur de l'enfant. Le tribunal a considéré que la preuve relative à la situation sociale de l'enfant telle que donnée par une autorité compétente de l'Etat de résidence habituelle de l'enfant doit être prise en compte en application de l'article 13 alinéa 3. La tribunal a reçu la preuve qu'une protection provisoire pouvait être obtenue des juridictions australiennes dans le but de protéger les parties au litige.
Le recouvrement des frais liés au retour de l'enfant, prévu par l'article 26, n’était pas indispensable dans le cadre de la procédure de retour immédiat de l'enfant. Par conséquent, paiement de ces frais serait sans incidence sur un demandeur bénéficiant de l'aide juridictionnelle. Le tribunal a relevé que lorsque le retour est ordonné, on devrait exiger du parent qui a enlevé l'enfant qu’il prenne en charge les frais impliqués par son retour, quoique l'exécution forcée de cette obligation puisse donner lieu à des difficultés.
L'interprétation de la notion centrale de résidence habituelle (préambule, art. 3 et 4) s'est révélée particulièrement problématique ces dernières années, des divergences apparaissant dans divers États contractants. Une approche uniforme fait défaut quant à la question de savoir ce qui doit être au cœur de l'analyse : l'enfant seul, l'enfant ainsi que l'intention des personnes disposant de sa garde, ou simplement l'intention de ces personnes. En conséquence notamment de cette différence d'approche, la notion de résidence peut apparaître comme un élément de rattachement très flexible dans certains États contractants ou un facteur de rattachement plus rigide et représentatif d'une résidence à long terme dans d'autres.
L'analyse du concept de résidence habituelle est par ailleurs compliquée par le fait que les décisions concernent des situations factuelles très diverses. La question de la résidence habituelle peut se poser à l'occasion d'un déménagement permanent à l'étranger, d'un déménagement consistant en un test d'une durée illimitée ou potentiellement illimitée ou simplement d'un séjour à l'étranger de durée déterminée.
Tendances générales:
La jurisprudence des cours d'appel fédérales américaines illustre la grande variété d'interprétations données au concept de résidence habituelle.
Approche centrée sur l'enfant
La cour d'appel fédérale des États-Unis d'Amérique du 6e ressort s'est prononcée fermement en faveur d'une approche centrée sur l'enfant seul :
Friedrich v. Friedrich, 983 F.2d 1396, 125 ALR Fed. 703 (6th Cir. 1993) (6th Cir. 1993) [Référence INCADAT : HC/E/USf 142]
Robert v. Tesson, 507 F.3d 981 (6th Cir. 2007) [Référence INCADAT : HC/E/US 935]
Voir aussi :
Villalta v. Massie, No. 4:99cv312-RH (N.D. Fla. Oct. 27, 1999) [Référence INCADAT : HC/E/USf 221].
Approche combinée des liens de l'enfant et de l'intention parentale
Les cours d'appel fédérales des États-Unis d'Amérique des 3e et 8e ressorts ont privilégié une méthode où les liens de l'enfant avec le pays ont été lus à la lumière de l'intention parentale conjointe.
Le jugement de référence est le suivant : Feder v. Evans-Feder, 63 F.3d 217 (3d Cir. 1995) [Référence INCADAT : HC/E/USf 83].
Voir aussi :
Silverman v. Silverman, 338 F.3d 886 (8th Cir. 2003) [Référence INCADAT : HC/E/USf 530] ;
Karkkainen v. Kovalchuk, 445 F.3d 280 (3rd Cir. 2006) [Référence INCADAT : HC/E/USf 879].
Dans cette dernière espèce, une distinction a été pratiquée entre la situation d'enfants très jeunes (où une importance plus grande est attachée à l'intention des parents - voir par exemple : Baxter v. Baxter, 423 F.3d 363 (3rd Cir. 2005) [Référence INCADAT : HC/E/USf 808]) et celle d'enfants plus âgés pour lesquels l'intention parentale joue un rôle plus limité.
Approche centrée sur l'intention parentale
Aux États-Unis d'Amérique, la Cour d'appel fédérale du 9e ressort a rendu une décision dans l'affaire Mozes v. Mozes, 239 F.3d 1067 (9th Cir. 2001) [Référence INCADAT : HC/E/USf 301], qui s'est révélée très influente en exigeant la présence d'une intention ferme d'abandonner une résidence préexistante pour qu'un enfant puisse acquérir une nouvelle résidence habituelle.
Cette interprétation a été reprise et précisée par d'autres décisions rendues en appel par des juridictions fédérales de sorte qu'en l'absence d'intention commune des parents en cas de départ pour l'étranger, la résidence habituelle a été maintenue dans le pays d'origine, alors même que l'enfant a passé une période longue à l'étranger. Voir par exemple :
Holder v. Holder, 392 F.3d 1009 (9th Cir 2004) [Référence INCADAT : HC/E/USf 777] : Résidence habituelle maintenue aux États-Unis d'Amérique malgré un séjour prévu de 4 ans en Allemagne ;
Ruiz v. Tenorio, 392 F.3d 1247 (11th Cir. 2004) [Référence INCADAT : HC/E/USf 780] : Résidence habituelle maintenue aux États-Unis d'Amérique malgré un séjour de 32 mois au Mexique ;
Tsarbopoulos v. Tsarbopoulos, 176 F. Supp.2d 1045 (E.D. Wash. 2001) [INCADAT : HC/E/USf 482] : Résidence habituelle maintenue aux États-Unis d'Amérique malgré un séjour de 27 mois en Grèce.
La décision rendue dans l'affaire Mozes a également été approuvée par les cours fédérales d'appel du 2e et du 7e ressort :
Gitter v. Gitter, 396 F.3d 124 (2nd Cir. 2005) [Référence INCADAT : HC/E/USf 776] ;
Koch v. Koch, 450 F.3d 703 (2006 7th Cir.) [Référence INCADAT : HC/E/USf 878] ;
Il convient de noter que dans l'affaire Mozes, la Cour a reconnu que si suffisamment de temps s'est écoulé et que l'enfant a vécu une expérience positive, la vie de l'enfant peut être si fermement attachée à son nouveau milieu qu'une nouvelle résidence habituelle doit pouvoir y être acquise nonobstant l'intention parentale contraire.
Autres États contractants
Dans d'autres États contractants, la position a évolué :
Autriche
La Cour suprême d'Autriche a décidé qu'une résidence de plus de six mois dans un État sera généralement caractérisée de résidence habituelle, quand bien même elle aurait lieu contre la volonté du gardien de l'enfant (puisqu'il s'agit d'une détermination factuelle du centre de vie).
8Ob121/03g, Oberster Gerichtshof [Référence INCADAT: HC/E/AT 548].
Canada
Au Québec, au contraire, l'approche est centrée sur l'enfant :
Dans Droit de la famille 3713, No 500-09-010031-003 [Référence INCADAT : HC/E/CA 651], la Cour d'appel de Montréal a décidé que la résidence habituelle d'un enfant est simplement une question de fait qui doit s'apprécier à la lumière de toutes les circonstances particulières de l'espèce en fonction de la réalité vécue par l'enfant en question, et non celle de ses parents. Le séjour doit être d'une durée non négligeable (nécessaire au développement de liens par l'enfant et à son intégration dans son nouveau milieu) et continue, aussi l'enfant doit-il avoir un lien réel et actif avec sa résidence; cependant, aucune durée minimale ne peut être formulée.
Allemagne
Une approche factuelle et centrée sur l'enfant ressort également de la jurisprudence allemande :
2 UF 115/02, Oberlandesgericht Karlsruhe [Référence INCADAT: HC/E/DE 944].
La Cour constitutionnelle fédérale a ainsi admis qu'une résidence habituelle puisse être acquise bien que l'enfant ait été illicitement déplacé dans le nouvel État de résidence :
Bundesverfassungsgericht, 2 BvR 1206/98, 29. Oktober 1998 [Référence INCADAT: HC/E/DE 233].
La Cour constitutionnelle a confirmé l'analyse de la Cour régionale d'appel selon laquelle les enfants avaient acquis leur résidence habituelle en France malgré la nature de leur déplacement là-bas. La Cour a en effet considéré que la résidence habituelle était un concept factuel, et les enfants s'étaient intégrés dans leur milieu local pendant les neuf mois qu'ils y avaient vécu.
Israël
Des approches alternatives ont été adoptées lors de la détermination de la résidence habituelle. Il est arrivé qu'un poids important ait été accordé à l'intention parentale. Voir :
Family Appeal 1026/05 Ploni v. Almonit [Référence INCADAT: HC/E/Il 865] ;
Family Application 042721/06 G.K. v Y.K. [Référence INCADAT: HC/E/Il 939].
Cependant, il a parfois été fait référence à une approche plus centrée sur l'enfant. Voir :
décision de la Cour suprême dans C.A. 7206/03, Gabai v. Gabai, P.D. 51(2)241 ;
FamA 130/08 H v H [Référence INCADAT: HC/E/IL 922].
Nouvelle-Zélande
Contrairement à l'approche privilégiée dans l'affaire Mozes, la cour d'appel de la Nouvelle-Zélande a expressément rejeté l'idée que pour acquérir une nouvelle résidence habituelle, il convient d'avoir l'intention ferme de renoncer à la résidence habituelle précédente. Voir :
S.K. v. K.P. [2005] 3 NZLR 590 [Référence INCADAT: HC/E/NZ 816].
Suisse
Une approche factuelle et centrée sur l'enfant ressort de la jurisprudence suisse :
5P.367/2005/ast, Bundesgericht, II. Zivilabteilung (Tribunal Fédéral, 2ème Chambre Civile) [Référence INCADAT: HC/E/CH 841].
Royaume-Uni
L'approche standard est de considérer conjointement la ferme intention des personnes ayant la charge de l'enfant et la réalité vécue par l'enfant.
Re J. (A Minor) (Abduction: Custody Rights) [1990] 2 AC 562, [1990] 2 All ER 961, [1990] 2 FLR 450, sub nom C. v. S. (A Minor) (Abduction) [Référence INCADAT: HC/E/UKe 2].
Pour un commentaire doctrinal des différentes approches du concept de résidence habituelle dans les pays de common law. Voir :
R. Schuz, « Habitual Residence of Children under the Hague Child Abduction Convention: Theory and Practice », Child and Family Law Quarterly, Vol. 13, No1, 2001, p.1 ;
R. Schuz, « Policy Considerations in Determining Habitual Residence of a Child and the Relevance of Context » Journal of Transnational Law and Policy, Vol. 11, 2001, p. 101.
La Cour d'appel anglaise a adopté une position très stricte quant à l'exception du risque grave de l'article 13(1) b) et il est rare qu'elle considère cette disposition applicable. Parmi les décisions ayant refusé d'ordonner le retour, voir :
Re F. (A Minor) (Abduction: Custody Rights Abroad) [1995] Fam 224, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 8] ;
Re M. (Abduction: Psychological Harm) [1997] 2 FLR 690, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 86] ;
Re M. (Abduction: Leave to Appeal) [1999] 2 FLR 550, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 263] ;
Re D. (Article 13B: Non-return) [2006] EWCA Civ 146, [2006] 2 FLR 305, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 818] ;
Klentzeris v. Klentzeris [2007] EWCA Civ 533, [2007] 2 FLR 996 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 931].
Une pratique s'est fait jour dans un certain nombre d'États contractants dans lesquels l'ordonnance de retour est prononcée sous réserve du respect de certaines exigences ou de certains engagements. Afin de s'assurer que ces mesures de protection sont susceptibles d'être exécutées, il peut être exigé du demandeur qu'il fasse enregistrer ces mesures en des termes identiques ou équivalents auprès des autorités de l'État de la résidence habituelle de l'enfant. Ces décisions sont généralement décrites comme des ordonnances « assurant le retour sans danger de l'enfant » ou « ordonnances miroir ».
Des ordonnances de retour ont été rendues par les juridictions suivantes sous réserve du prononcé d'une ordonnance assurant le retour sans danger de l'enfant ou d'une ordonnance miroir :
Australie
Director-General Department of Families, Youth and Community Care and Hobbs, 24 September 1999, Family Court of Australia (Brisbane) [Référence INCADAT : HC/E/AU 294] ;
Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re W. (Abduction: Domestic Violence) [2004] EWHC 1247, [2004] 2 FLR 499 [Référence INCADAT : HC/E/ UKe 599] ;
Re F. (Children) (Abduction: Removal Outside Jurisdiction) [2008] EWCA Civ. 842, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 982] ;
Afrique du Sud
Sonderup v. Tondelli 2001 (1) SA 1171 (CC) [Référence INCADAT : HC/E/ZA 309] ;
Central Authority v. Houwert [2007] SCA 88 (RSA); [Référence INCADAT : HC/E/ZA 900].
Une demande déposée par la High Court anglaise concernant des mesures de protection prises dans le cadre d'une décision relative aux termes d'un droit de visite international et enregistrées dans l'État où les périodes de visite devaient se dérouler a été reprise et prolongée au Panama dans la décision :
Ruling Nº393-05-F [Référence INCADAT : HC/E/PA 872].
Une demande sollicitant le retour d'un enfant sous réserve qu'une ordonnance miroir soit rendue dans l'État d'origine fut rejetée par les juridictions israéliennes dans Family Application 8743/07 Y.D.G. v. T.G., [Référence INCADAT : HC/E/IL 983], les accusations formulées à l'encontre du père ayant été déclarées sans fondement.